COMMEMORATION DE LA FUSILLADE DU 26 MARS 1962, RUE D'ISLY, ALGER

ALLOCUTION DU 26 MARS 2016

LUNDI 26 MARS 1962... Les accords d’EVIAN sont signés depuis une semaine, censés redonner la paix en Algérie meurtrie depuis 7 ans... Il n’en sera rien !

Le 19 Mars, en effet, l’Armée Française bien qu’en position de force sur le terrain, a reçu l’ordre de cesser le combat et de se retirer dans ses casernes en application de ces accords iniques.

La France consent à abandonner au seul FLN une large portion du territoire National, ses départements français d’outre méditerranée ainsi 'que le Sahara qui n’était même pas revendiqué.

L’ennemi en profite pour reconstituer, d’une part, ses forces amoindries avec l’appui des combattants de la 25eme heure en provenance du Maroc et de la Tunisie et multiplier, d’autre part, les attentats et les enlèvements pour assurer sa mainmise sur le territoire.


Les 3 mois qui séparent ces accords de  l‘indépendance qui sera proclamée le 5 Juillet 1962 seront les plus sanglants du conflit avec notamment ce qui va se passer le 26 MARS à ALGER, le 5 JUILLET à ORAN, et durant des semaines, dans le bled, avec le massacre des supplétifs de l’Armée Française, ces dizaines de milliers de HARKIS abandonnés sans armes à la folie meurtrière des tueurs du FLN et de l’ALN.

En réaction les Patriotes sont appelés à résister ; une fusillade les oppose malheureusement le 23 MARS dans le quartier de BAB EL OUED à ALGER avec les membres d’une patrouille de l’armée.... des militaires sont tués dans l’affrontement...

En représailles l’armée isole totalement ce quartier populaire pour y chercher des commandos de 1’OAS, en pure perte d’ailleurs.

C’est une opération de guerre conduite avec des milliers d’hommes de troupe, gendarmes mobiles et CRS, des blindés (chars et half-tracks armés de mitrailleuses de 12/7), des hélicoptères et même 2 avions de chasse T6 qui mitraillent en piqué les toitures et les terrasses du secteur.

3 jours plus tard, dans la matinée du 26 MARS, un mot d’ordre se propage en ville : grève générale de solidarité avec nos compatriotes encerclés, rassemblement devant la GRANDE POSTE d’ALGER à 14 heures pour se rendre en cortège et en silence, drapeaux en tête, vers BAB EL OUED.

A partir de midi, dans une ville morte, d’innombrables groupes d’hommes, de femmes et d’enfants se dirigent vers le centre. De très nombreux barrages filtrants les laissent passer :

LA NASSE SE REFERME...

Devant la GRANDE POSTE le cortège se forme et prend la direction de la RUE D’lSLY tout juste contrôlée par une simple section de très jeunes tirailleurs musulmans portant l’uniforme du 4ème Régiment de TIRAILLEURS ALGERIENS, commandée par le Lt OUCHENE.

Après quelques palabres ces militaires “français”, en treillis de combat, casque lourd sur la tête, visage fermé, passablement inquiets, lourdement armés de pistolets mitrailleurs, chargeurs engagés et porteurs de ces nouveaux fusils mitrailleurs (AA52) approvisionnés de longs chapelets de balles, se replient et se placent le long des trottoirs faisant face à la Gde Poste.

D’autres militaires se sont positionnés le dos aux vitrines des magasins bordant la rue d’1SLY

LE PIEGE EST PRET A FONCTIONNER...

Le cortège poursuit son avancée, drapeaux en tête et en silence : on entend que le piétinement impressionnant des milliers de manifestants. Les premiers marcheurs sont déjà assez loin quand d’un coup, sans sommation, les soldats ouvrent le feu de toutes leurs armes, à bout portant, sur la foule désarmée... IL EST 14 h 50.

Le vacarme est assourdissant, infernal. Les gens se couchent ou courent à la recherche d’un moindre abri, d’une encoignure de porte, d’un caniveau... dérisoires remparts de protection.

Les rafales les atteignent inexorablement, des mares de sang se forment sous les corps transpercés, des blessés sont achevés, le docteur MASSONAT portant secours est tué à bout touchant.

Les soldats ivres de fureur rechargent leurs armes et tirent sans arrêt malgré les exhortations maintes fois répétées de cesser le feu... 10 longues minutes de tuerie et la boucherie prend fin quand les gisants cessent de s’agiter...

Le massacre est consommé : plus de 80 tués et 200 blessés témoignent de cette fusillade sanguinaire...

2.000 douilles jonchent le sol...

L'ALGERIE FRANCAISE VIENT D'ETRE ASSASSINEE


Très vite, les victimes déposées dans les morgues des hôpitaux, et singulièrement au dépositoire de l’hôpital de Mustapha, seront transportées clandestinement de nuit pour être inhumées sans témoin...

Les gerbes et les modestes bouquets déposés sur les lieux du massacre seront piétinés et enlevés par les “forces de l’ordre”

Les traces du forfait doivent être effacées sans délai...

Ce que le FLN n’a pas pu obtenir en 7 ans de terreur, de crimes et d’enlèvements, cette tuerie perpétrée sur ordre, par notre ARMEE - même si les tueurs fous du 26 Mars étaient vraisemblablement d’anciens rebelles de la Willaya 4, ils portaient l’uniforme du 4ème RTA - cette tuerie donc va nous entraîner, aux côtés des Harkis rescapés des massacres, dans un inexorable exode dramatique.

 

Les français à “PART ENTIERE” que le chef d’état en devenir nous assurait être en JUIN 1958 du balcon du Gouvernement Général d’Alger n'étaient plus, en cet été 1962, que des français ”totalement à part”


Avant de terminer ce propos, mes chers amis, n’oublions pas de garder en mémoire et de saluer les 1 053 648 français de Métropole qui ont rejeté ces accords d’Evian lors du référendum du 8 AVRIL 1962, consultation dont nous étions exclus bien qu’étant les premiers concernés...

Ils s’élevaient, eux aussi, contre l’abandon des départements français d’Algérie et, vraisemblablement plus perspicaces que leurs compatriotes, ils espéraient ne pas devoir vivre à leur tour, cette fois dans l’Hexagone, notre quotidien d’attentats et de fusillades...

Hélas, nous y sommes...

 

Roger SUDRY 

26 MARS 2016

 

Mis en page le 27/03/2016 par RP