Voici une vie peu commune.
En novembre 1942, André Rossfelder, Français d'Algérie de la quatrième
génération, engagé dans la Résistance, manque de peu d'être fusillé par
des soldats aux ordres de Vichy; puis, aspirant dans le 1er régiment de
chasseurs parachutistes, un corps d'élite, il participe, avec ses
compatriotes d'Afrique du Nord, aux durs combats pour la libération de
la France, dans les Vosges et en Alsace.
Vingt ans plus tard, ayant
quitté clandestinement l'Algérie après l'échec du " putsch " des
généraux, il est condamné à mort par contumace pour son rôle dans
l'attentat, manqué, du mont Faron contre le général de Gaulle.
Entre-temps, géologue et docteur ès sciences, convaincu que le sous-sol
algérien recèle de vastes réserves d'hydrocarbures, il s'est lancé dans
la prospection pétrolière - et le pétrole a jailli, au sud de l'Atlas,
en abondance.
Les premiers troubles l'ont vu militer, aux côtés de
Camus, pour une " trêve civile ".
Il a vécu la bataille d'Alger, les
succès de la pacification, le 13 mai 1958 et l'espérance d'un nouveau
départ, qu'ont suivis les revirements de la politique gaulliste et
l'indépendance : l'Algérie livrée au FLN, des dizaines de milliers de
pieds-noirs et de musulmans fidèles à la France chassés, torturés,
massacrés.
Les années ont passé. Résidant à l'étranger, spécialiste de la géologie
sous-marine, André Rossfelder n'a pas oublié, et d'autant moins qu'il a
découvert une histoire réécrite dans laquelle il ne se reconnaît pas,
tandis que l'Algérie, appauvrie, s'enfonçait dans une nouvelle guerre
civile.
Il raconte et il témoigne, contre ce qu'il tient pour un déni de
vérité et de justice, par solidarité à l'égard des victimes,
pieds-noirs et musulmans, doublement assassinés, dans la réalité et dans
l'histoire.
Tel est le onzième commandement : tu seras fidèle aux
tiens, surtout quand la nation les oublie ou les diffame.