Quelques renseignements sur la Villa Abd el Tif

La Villa, son histoire autant que faire ce peut ! Le plus simplement du monde reprenons in extenso le texte de Henri Klein , qu’il publia en 1910 dan s les " Feuillets d’El Djezaïr ".

" Cette villa du Hamma servit dès 1831, de dépôt de convalescence à la Légion Etrangère ;

Le plus ancien acte connu (de Klein) qui en fasse mention, date de 1715. Il y eut au nombre de ses propriétaires, Ali-Agha "  qui la vendit pour 325 réaux d’argent ", Mohammed-Agha, Hadj Mohammed Khodja, ministre de la marine ; la femme d’un secrétaire général de la Régence ; puis le Sid Abd-el-Tif qui, en 1795, acheta la djenan pour 2000 dinars d’or.

"  Cette villa , dit un rapport militaire en 1831, est située dans un site élevé, saint et riant. Cent cinquante lits peuvent y être installés. Il serait nécessaire de la garder pour les soldats étrangers n’ayant pas de foyer où aller se remettre. ( donc une maison de convalescence du troupier)

Auprès d’Abd el Tif, existait la maison " des Orangers " , occupée à cette époque, par quatre ménages d’officiers de la Légion Etrangère, parmi lesquels, un officier supérieur. Cette maison, de dimensions plus petites, présentait l’inconvénient d’une grande humidité.

" En raison du désarroi où se trouvaient les affaires du pays aux premièrs jours de l’occupation, les droits de propriété du Sid Mahmoud ben Abd-el-Tif ne furent pas immédiatement reconnus ; aussi le loyer de sa villa demeura-t-il assez longtemps impayé ( C’est peut être le seul reproche que l’on puisse faire à l’administration française ) .

" Le 4 octobre 1834, Abd-el-Tif écrivit au Gouverneur une lettre à ce sujet. Il y déclarait que sa villa dont la valeur était avant 1830, de 30.000 piastres d’Espagne, avait été dégradée, et que les arbres en avaient été coupés . " Les autres maisons de campagne, disait-il, ont été évacuées au début de 1834. La mienne ne l’est pas encore ! "La requête se terminait par ces mots : "  Je m’adresse à vous, que nous croyons avoir la mission de fermer les plaies que nous ont faites les premiers temps de la conquête. "

" Abd-el-Tif adressa une supplique semblable au Ministre de la Guerre. "

" Peu de temps après, la villa, reconnue propriété Abd-el-Tif, devenait l’objet d’une location qu’avait autorisée, le 24 septembre 1834, le Comte d’Erlon…Gouverneur.

Un acte officiel établit que la famille Abd-el-Tif loua tout d’abord, la villa à un juif nommé Mouchi ben Chebebi Boucaya.

Cette location fut consentie pour six années, moyennant 1.000 francs par an, et "  3.500 francs donnés en paiement du loyer dû depuis trois années et demie ". Il était stipulé dans les conditions du bail que l’acquéreur ne ferait rien qui pût porter préjudice à la campagne : " soit en enlevant des carreaux, les marbres, la fontaine, les fenêtres et autres choses ( c’est vaste autres choses ?) "

Ce juif afferma, le 2 novembre 1834, la villa à la France que représentaient en la circonstance, le capitaine Boti, chef du Génie et le Sous-Intendant Barona.

En 1836, après le départ de la Légion Etrangère pour l’Espagne, on jugea inutile la conservation de cette campagne dont le bail de location fut résilié, le 11 février, avec l’autorisation du Général Schram.

" Quelques années plus tard, l’Etat en devint acquéreur au prix de 75.000 francs. Elle demeura la propriété du Domaine qui la loua à la Compagnie fermière du Jardin d’Essai. Reprise par le Gouvernement Général en 1905, elle a été restaurée par M.Jonnart ,( à ses frais personnels), qui la mit gracieusement à la disposition des artistes peintres, boursiers du Ministère des Beaux-Arts. Abd-el-Tif est depuis 1922 Monument Historique.

" A signaler dans cette villa, l’ancien Bassin des Femmes que borde un portique à parure d’émail, la cour intérieure où se développe une galerie à double ligne d’arceaux soutenus par d’élégantes colonnettes à cannelures torses. En face, le porche d’entrée, élevé sur douze colonnes et abritant sous ses ogives , une porte à clous et à heurtoir de bronze.

" Au delà des voûtes du vestibules et de l’escalier d’aspect monacal, c’est le bain maure puis, au premier étage, le patio, tout de marbre, entouré d’arcades et décoré de faïences où s’épanouissent de curieuses floraisons stylisées. Sous les arceaux de hautes portes donnant accès en des salles surmontées de coupoles à claustras multicolores. Au centre, un pavillon à dôme polygonal d’où s’étend la vue, sur la baie et la campagne. Au sommet, la terrasse, offrant le charme de l’entier panorama algérois. "

 

Depuis le 15 avril 1907, deux peintres sont recrutés à Paris, à la suite d’un concours. Ils reçoivent, outre le logement, une bourse annuelle de 3000 frs chacun, prélevée sur le budget du gouvernement général de l’Algérie.

Les deux premiers titulaires pensionnaires d’Abd-el-Tif furent en 1907 Léon Cauvy, peintre et Paul Jouve, peintre et sculpteur.

La guerre de 1914-1918 a suspendu les nominations jusqu’en 1920.

La guerre de 1939 a suspendu les nominations jusqu’en 1944.

Les derniers pensionnaires furent en 1961 Victorius Candale, peintre et Françoise Naudet, sculpteur..

Il y eut en tout et pour tout 86 pensionnaires à Abd el Tif durant la période française plus les deux derniers nommés en 1961 qui n’ont pu se rendre en Alger en raison des évènements.  

Théo BRUAND d'UZELLE (Cercle Algéraniste de Lons le Saulnier)

 

 

Mis en page le 07/10/2004 par RP