JEUNE PIED-NOIR
BP 4 -91570 BIEVRES
Fax : 01 69 41 89 29
E-mail : jeunepiednoir@wanadoo.fr
|
Le 31 octobre 2005
« L'Algérie avait été
tirée d'une anarchie millénaire par la conquête
française... L'uvre accomplie est de celles dont
nous pouvons être fiers. »
Charles De Gaulle -Déclaration remise à la presse
le 18 août 1947
|
LETTRE OUVERTE
|
Monsieur Jacques CHIRAC
Président de la République
Palais de l'Elysée
55, rue du Faubourg Saint-Honoré
75008 PARIS
|
Monsieur le Président de la République,
Depuis plusieurs mois les médias français et algériens
annoncent la signature, avant la fin de cette année, d'un
traité d'amitié entre la France et l'Algérie.
Depuis quelques semaines circulent l'annonce du voyage que vous
effectueriez au mois de novembre en Algérie pour signer ce
traité et la rumeur que vous y ferriez repentance au nom
de la France.
Nous tenons à souligner que nous ne sommes pas contre un
rapprochement des populations algérienne et française
dont les liens humains et affectifs, encore très forts, sont
l'héritage d'une longue histoire commune. Mais un traité
d'amitié, qui engagerait la France et tous les Français,
ne peut être à sens unique. Le Parlement français
doit être impliqué dans sa préparation et le
Peuple français, notamment les Français d'Algérie
directement concernés, doivent être consultés
sur son contenu avant qu'il soit ratifié entre les deux Pays.
Nous tenons à vous faire part de nos préoccupations
et des points qui nous paraissent indispensables pour que ce traité,
s'il doit se faire, renforce réellement les liens d'amitié
des populations française et algérienne.
- - Le respect des Droits de l'Homme. L'Algérie est signataire
de la Chartre de 1948. La France peut-elle accepter que des citoyens
français soient refoulés ou insultés lors
de leur arrivée en Algérie? La libre circulation
sans contrainte des harkis et de leurs enfants est la première
des conditions d'un traité équilibré. D'une
façon plus générale, la France peut-elle
apporter sa caution au gouvernement actuel de l'Algérie
alors que les atteintes aux Droits de l'Homme touchent tous les
jours la population algérienneet que ce pays conna”t une
guerre civile permanente ayant fait ces dix dernières annéesplus
de 200.000 morts?
- - L'amitié c'est en premier lieu le respect mutuel. Le
Président et les autorités algériennes doivent
s'engager à ne plus tenir de propos insultants et affirmer
des contre-vérités historiques dans leurs relations
avec la France. Les 132 années de présence française
en Algérie, pays dont la France a créé le
nom et les infrastructures modernes, font partie de l'histoire
commune de ceux qui ont vécu et vivent sur ce territoire.
- - La reconnaissance des sacrifices des Français d'Algérie
de toutes origines dans la libération de la France de l'occupation
nazie. La Légion d'honneur que vous avez attribuée
à la ville d'Alger, capitale de la France combattante en
1942-44, peut-elle être remise tant que le monument aux
Morts d'Alger n'a pas été réhabilité
ou reconstruit? Peut-elle avoir lieu en l'absence des anciens
combattants Français-musulmans, pieds-noir et métropolitains
du CEFI, de la 2eDB et de la 1e Armée française?
- - Il ne peut y avoir de quelconque repentance de la France.
Toute repentance à sens unique retirerait toute valeur
au futur traité d'amitié. La présence française,
même si elle n'a pas été parfaite et parfois
marquée de violences, n'a pas été la succession
de crimes et massacres dont l'accuse le Président algérien,
comme le soulignait déjà très justement en
1947 le général De Gaulle. La première guerre
d'Algérie (1954-1962) n'a pas été une guerre
"sans nom" entre nations, elle a été une guerre
civile pour la conservation ou la prise du pouvoir entre des hommes
aimant la même terre. Comme toutes les guerres civiles,
elle ne pourra se conclure que par une reconnaissance commune
des victimes des deux parties. Actuellement les deux pays commémorent
leurs morts séparément. Est-il et comme le fait
le Maire de Paris pour la répression par le gouvernement
du Général De Gaulle de la manifestation FLN du
17 octobre 1961 ? Le Maire d'Alger envisagerait-il d'honorer les
victimes de la fusillade de la rue d'Isly du 26 mars 1962 en apposant
une plaque sur la Grande Poste d'Alger? Le Maire d'Oran accepterait-il
qu'un monument soit édifié dans sa ville en mémoire
des victimes du massacre des pieds-noirs du 5 juillet 1962? L'Algérie
serait-elle prête à faire graver dans son mémorial
aux Martyrs d'Alger les noms des 150.000 harkis massacrés
par le FLN après le 19 mars 1962?
Ces crimes et massacres sont désormais reconnus en France
par la loi du 23 février 2005. Cette loi est l'expression
de la volonté de la Nation traduite par les parlementaires.
Les opposants à cette loi ont eu plus de deux ans de débats
publics pour s'exprimer. Ils ne l'ont pas fait. Quelques historiens
"militants", comme ils se désignent eux-mêmes, sans
mandat électif, et des intellectuels, qui ont été
silencieux durant 40 ans sur les crimes dont ont été
victimes les Français d'Algérie, peuvent-ils prétendre
être les juges d'une loi qui est l'expression de la volonté
populaire? La France peut-elle accepter que le Chef de l'Etat et
les parlementaires algériens interviennent dans les affaires
intérieures françaises sans réagir? Comme toute
loi votée, elle s'impose à tous les Français.
Les Français d'Algérie que nous représentons
vous demandent qu'elle soit mise en oeuvre dans son intégralité
dans les meilleurs délais. Notre association et tous ceux
qui la soutiennent s'engagent à veiller à sa bonne
application.
Le futur traité d'amitié ne doit pas être de
nouveaux accords d'Evian, c'est à dire un texte plein de
bonnes intentions mais inapplicable concrètement. Un tel
accord doit être signé dans le cadre d'une relation
totalement équilibrée, marquée de gestes positifs
des deux Pays. Nous ne comprenons pas la nécessité
de précipiter sa signature ce qui le ferait appara”tre aujourd'hui
comme un accord de circonstance et non d'amitié. N'est-il
pas souhaitable de le différer à fin 2006, voire même
à début 2007, année qui marquera le 45e anniversaire
de l'Exode des Français d'Algérie? En 2003 il y a
eu l'Année de l'Algérie en France. L'année
2007 ne pourrait-elle pas être celle de la France en Algérie?
Ce geste de réciprocité de l'Algérie serait
fortement symbolique. Des deux côtés de la Méditerranée
les populations ont commencé un lent travail de mémoire.
Elles doivent être en cela aidées par les historiens
dont le rôle est d'apporter une vision exacte du passé
et par les intellectuels dont la réflexion doit permettre
d'apaiser les drames vécus en proposant une vision positive
de l'avenir. La Fondation de la Mémoire de la Guerre d'Algérie
et des Combats du Maroc et de Tunisie, prévue pour 2006 dans
la loi du 23 février 2005, ne devraitelle pas, dans ce but,
être élargie à l'ensemble de l'histoire de l'Afrique
du Nord française? Elle permettrait ainsi aux victimes, aux
associations, aux historiens, aux chercheurs et aux hommes politiques
français de préparer les bases de nouveaux liens entre
la France et l'Algérie.
Compte tenu de l'importance que vous semblez apporter à
la signature rapide de ce traité, nous vous demandons respectueusement
de bien vouloir recevoir avant votre voyage en Algérie une
délégation de membres du nouveau Haut Conseil des
Rapatriés et de personnalités qualifiées. Les
deux millions de Français d'Afrique du Nord et d'Outre-mer,
les Anciens Combattants d'Algérie et leurs nombreux amis
attendent de vous des réponses aux questions qu'ils se posent
et auxquelles leurs parlementaires ne peuvent répondre.
Dans cette attente, nous vous prions de croire, Monsieur le Président
de la République, à l'assurance de notre très
haute considération.
Bernard COLL -Secrétaire général de
JPN
- Copies:
-M. Le Premier Ministre, Mme La Ministre de la Défense,
M. Le Ministre Délégué aux Anciens Combattants,
M. Le Ministre des Affaires Etrangères,
- Mesdames et M. Les Députés et Sénateurs,
les historiens, les Intellectuels et les médias.
- MM. Les Présidents de la MIR des Associations de Français
d'AFN et d'Anciens Combattants
|