COMMENTAIRES...
Maurice
BRUNETTI
|
LES VOLEURS DE SOLEIL. (Balland) |
COMMENTAIRES....
Taoughazout.
Un village oublié du sud de l'Oranie. Au Moyen Age pourtant le grand
historien arabe Ibn Khaldoun s'y était retiré durant quatre ans
pour rédiger ses Prolégomènes. Pendant l'Algérie
française ce fut un douar rattaché au bourg colonial de Frenda
où Maurice Brunetti exerça en tant que commissaire de police.
Plume déliée aussi, qui devait plus tard se faire connaître
à travers un roman policier à succès (Traque au turf, Fleuve
noir, 1984), il a maintenant ressorti ses carnets du bled algérien des
années 50. Et il en a extrait ces Voleurs de soleil, fresque populaire
et picaresque de la vie quotidienne, observation à la loupe de la société
musulmane des djebels, avec ses querelles internes - les fameuses chikayas
et ses rapports apaisés mais ambigus avec les autorités
françaises. Un petit monde que va balayer le séisme de la guerre
d'indépendance (19541962). Les «voleurs de soleil»
ce sont ceux, pour Maurice Brunetti, qui, avec les premières bombes nationalistes
de la Toussaint 1954, ont détruit cet univers franco-musulman, «à
la fois inégalitaire et heureux»; l'auteur l'a connu de l'intérieur
et il a su le ressusciter avec minutie. Humour et sympathie tissent l'histoire
vraie d'un douar oranais à l'heure où tout va basculer mais où
personne ne se doute encore de rien.
Vous lirez un conte Algérien avec les enjolivures
de la phraséologie arabe. Vous y retrouverez la vie paisible des petits
douars du Sud de Frenda, les jalousies de familles de fellahs, les murs arabo-musulmanes,
le pouvoir de Champèt (le Garde Champêtre) amoureux de la France
dans cette Algérie profonde. Vous rirez à en avoir un point de
côté devant la précision des descriptions et des dialogues
de Maurice Brunetti.
Mais arrivent Novembre1954, les assassinats de Musulmans et de Chrétiens,
les fermes qui brûlent, au nom du Très-Haut, Très Miséricordieux
et, comme les habitants de Taoughazout vous vous promènerez en un silence
triste dans les ruelles du Douar. Vous fermerez ce livre en vous demandant :
Pourquoi ?
En 2003, le Prix Littéraire Norbert Cépi a échappé de peu à Maurice Brunetti pour ses Voleurs du Soleil
Jean-Pierre Ferrer