Jean Castex n'est pas un Beni Oui-Oui ? Qu'il le montre.
Mais une occasion en or s'offre à lui de montrer qu'il n'est
pas venu pour beurrer les sandwichs : le président algérien
Abdelmadjid Tebboune a dit samedi attendre des " excuses de la
France pour la colonisation de l'Algérie ". Emmanuel Macron
est ficelé, réduit au silence. Quand on a dit pendant
sa campagne, pour ratisser du côté de la diversité,
que la colonisation était un crime contre l'humanité,
forcément, il ne reste rien d'autre à faire que se taire
ou s'exécuter. Mais son Premier ministre, lui pourrait montrer
sa fermeté : " Je suis fidèle à la France
", a-t-il joliment dit pour justifier ses retournement de veste.
Si la France est son trésor, c'est le moment de le prouver ;
touchez pas au Grisbi !
Oh bien sûr, inutile de faire une déclaration officielle
urbi et orbi, il ne s'agit pas non plus de rendre le soufflet du dey
d'Alger, la fin d'un petit entretien matutinal radiophonique avec une
Ruth Elkrief ou un Jean-Jacques Bourdin y suffira, une fois que le remaniement
aura été largement commenté et que l'on voudra
réveiller l'auditeur assoupi le nez dans son café, écoutant
égrener la liste sans fin des obscurs maroquins.
L'Algérie attend des excuses ? La France aussi, pardi.
Pour les razzias barbaresques en Méditerranée ayant réduit
en esclavage des centaines de milliers d'Européens. Ce sont même
elles qui ont conduit Charles X à lancer l'expédition
d'Alger. Pour les Pieds Noirs assassinés ou chassés. Pour
la tombe de leurs aïeuls profanée. Pour les biens dont ils
ont été spoliés et qui ont été sus
dilapidés : lorsque la France est partie, Alger ressemblait à
Nice, c'est aujourd'hui Bagdad, à peu de choses près.
Pour la mauvaise foi d'un État failli qui, depuis 60 ans, use
de la colonisation comme d'un épouvantail fatigué, d'une
vieille ficelle archi-usée pour excuser son impéritie,
et pour cette impéritie qui conduit ses ressortissants à
traverser en masse l'Atlantique, notamment pour se faire soigner - comme
le montre la vague de malades du coronavirus qui vient de débarquer…
Maintenant, ça suffit l'Algérie. La plaisanterie a assez
duré. Le cave se rebiffe : les Français seraient si fiers,
enfin, après des années de lâcheté ! Mais
il est à craindre que ce ne soit là que cinéma.
Gabrielle Cluzel.
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