AUX FEMMES ET AUX HOMMES DE BONNE VOLONTÉ
Études 17, 18 et 19, synthétisées en un seul article

 

DU PSEUDO ROYAUME ARABE DE NAPOLEON III A L’AFFAIRE EL OKBI (1936)

 

OU

 

COMMENT LA LAICITE DEVINT L’OBJECTIF PREMIER

A DETRUIRE EN ALGERIE FRANCAISE A PARTIR DE 1920

 

 

« Le langage spirituel n’est pas un balbutiement qui précède le langage scientifique. C’est bien plutôt l’aboutissement de ce dernier. »

(Pauwels-Berger « Le Matin des Magiciens »).

 

 

PREMIERE PARTIE

 

 

Naissance du fondamentalisme islamo-berbère en Algérie.

Délire du « Royaume Arabe »

 

 

            Ceux qui parmi les Algériens contemporains n’ont pas connu la France, semblent escamoter une vérité historique, qu’il n’est pas déraisonnable de réactualiser aujourd’hui. Dépourvu de l’intention de porter atteinte à tout sentiment national, il ne me semble pas superflu de rappeler en effet, qu’avant d’être proclamé de nationalité algérienne, le peuple musulman d’Algérie, dans son immense majorité, connaissait une première et unique nationalité à partir de 1830 : la nationalité française.

Celle-ci fut constatée d’abord, puis confirmée officiellement et publiquement le 14 juillet 1865 à l’occasion du Sénatus-Consulte de Napoléon III.

Dans ce sénatus-consulte, il était précisé, en substance, que « l’indigène algérien de confession musulmane était de nationalité française ». Comment était-ce possible ? Je me permets de répondre à cette interrogation logique par une réponse qui, elle-aussi, me paraît logique.

Parce que, jusqu’en 1830, l’Algérie ne connaissait aucune existence historique.  Ce n’était pas un état, encore moins une nation libre, indépendante, reconnue comme telle par ce que l’on appelle, avec optimisme, la communauté internationale. La nation algérienne n’existait pas en 1830, certes. Mais la terre algérienne quant à elle, était bien réelle. Il en allait de même des peuples algériens qui ne bénéficiaient d’aucune identité nationale.

 

            Depuis plus de 3 siècles en effet, depuis Khayr al-Din, alias Barberousse, la terre algérienne était une province soumise par un acte volontaire à l’autorité de la Sublime Porte ottomane. Depuis 1518.C’était un territoire vassal de l’empire ottoman contrôlé par des janissaires et des aghas. Un territoire qui chaque année était astreint à payer tribut au sultan de Constantinople. Les habitants de la terre algérienne, pour autant, n’étaient pas des sujets turcs. Ils étaient soumis à l’autorité de Constantinople, nous venons de le préciser, mais n’étaient pas intégrés à la nationalité turque. Comme l’évoquent Robert Aron et d’autres auteurs, avant l’arrivée de la France, ils étaient apatrides sur la terre de leur naissance.

Ils furent intégrés, de facto, à la nationalité française, à partir du moment où l’occupation de la terre algérienne par la France fut acceptée officiellement par la majorité du corps diplomatique international.

Aujourd’hui encore, nombreux sont ceux qui manifestent un surprenant étonnement lorsqu’ils prennent connaissance de cette vérité. Avant la France, la terre d’Algérie n’était pas une nation, confirmons-le. C’était une régence, la Régence Turque d’Alger. La représentation internationale qui siégeait à Alger réunissait des consuls ou des ministres plénipotentiaires. Mais en aucun cas des ambassadeurs. Il n’existait pas de corps diplomatique à Alger, mais insistons encore, un corps de représentation consulaire.

Lorsque la France arrive, celle-ci apporte « beaucoup de choses en Algérie ». Evidemment. Mais elle apporte avant tout, obligatoirement, une nationalité. La nationalité française qui offre un avantage : celui d’exister sur le plan international. Avec les obligations inhérentes à cette nationalité, bien évidemment.

Une obligation fondamentale est illustrée par celle de se soumettre, comme tous les autres nationaux français, au code constitutionnel et au code pénal français. Toute atteinte à l’entité française, à la personnalité historique de la France, sera considérée comme une agression contre l’intégrité nationale française et justiciable de poursuites pénales pour atteinte à la sûreté  intérieure de l’Etat. Dans l’éventualité où cette atteinte s’exerce avec des complicités étrangères, il s’agit du crime d’atteinte à la sûreté extérieure de l’Etat, passible éventuellement de la peine de mort. Un seul drapeau est accepté et reconnu : c’est le drapeau national français, le drapeau tricolore.

Dans un autre domaine, cette nationalité octroyée aux habitants par leur naissance sur une terre occupée et administrée par la France encore une fois avec l’acceptation de la communauté internationale et nous ajoutons, avec l’appui de l’immense majorité du peuple algérien, implique une seconde obligation légale, impérative et incontournable : une soumission comme tous les autres nationaux français, au code pénal français. Il n’est pas concevable pour la France, d’accepter que s’exerce sur la terre algérienne, devenue française, une justice pénale d’inspiration religieuse. D’inspiration coranique en l’occurrence, en lieu et place du code pénal français.

Les auteurs de délits seront renvoyés devant un tribunal correctionnel. Les auteurs de crimes, seront renvoyés devant une cour d’assises. Les sanctions éventuellement appliquées seront identiques à celles que l’on connaît en France.

Le sénatus-consulte du 14 juillet 1865 ne faisait que constater solennellement ce qui déjà se vérifiait comme une réalité vécue dans la pratique quotidienne depuis 1830. Il avait le mérite d’offrir au monde le constat suivant : tout individu qui naissait sur le territoire algérien jouissait au minimum, de la nationalité française. Beaucoup de frontaliers marocains, de confession juive en particulier, ne laissèrent pas passer l’occasion de venir résider en Algérie et de voir leurs enfants nés sur ce territoire devenir titulaires de la nationalité française. Nationalité qui leur permettait un retour au Maroc, comme des nationaux français cette fois.

La nationalité française… et c’est tout.

Car, en raison de la pratique du culte musulman à cette époque, il est impossible de déclarer qu’un Algérien, de confession musulmane, soumis au code coranique et réfractaire au code Napoléon, est aussi un citoyen français.

La citoyenneté, en effet, implique une soumission de tous les nationaux français quelles que soient leurs religions et la couleur de leur peau, aux exigences du code civil français, le code Napoléon.

Or, Napoléon III, et plus tard les responsables de la IIIème République « respectèrent » à outrance, le code coranique.

Ils ne proposèrent aucune tentative sérieusement étudiée avec des autorités religieuses musulmanes, pour faciliter l’intégration des nationaux français musulmans (1) à la citoyenneté française. Aucune étude philosophique, religieuse, dogmatique appliquée et approfondie, ne fut proposée pour faciliter la sécularisation des musulmans. Celle-ci devait être tentée malgré ceux qui soutiennent qu’islam et sécularisation sont des termes dogmatiquement incompatibles.

Ces précisions vous sont fournies par le moyen d’une terminologie très schématique, je le conçois, pour toucher du doigt avec vous, et aujourd’hui encore plus qu’hier, une double vérité que beaucoup ne veulent pas retenir :

-       d’une part, l’importance de la religion dans ce qui fut le destin de l’Algérie et de l’Algérie française tout particulièrement ;

-       d’autre part, comment déjà en France, la laïcité avait accédé volontairement aux exigences de l’arabo-islamisme fondamentaliste, parce que celles-ci étaient animées avant tout d’une volonté anti-chrétienne dominante pour ne pas dire exclusive.

 

 

Napoléon III cependant semblait avoir bien compris l’importance du facteur religieux sur la terre algérienne.

On lui prête l’initiative d’avoir fait le constat, un jour, que l’Algérie « était un Royaume Arabe ! ». Ce propos a connu une fortune inouïe depuis le livre d’un ancien ministre gaulliste et surtout chiraquien, M. Seguin, élu du des Vosges, ancien président de la Cour des comptes, qui prétendait démontrer grâce à cette pseudo-citation, en réalité une contre-vérité, que l’intégration de l’Algérie française était impossible. Je ne crois pas prendre de risques en affirmant que cette dernière affirmation doit être enregistrée comme dangereuse. Je m’explique.

Si l’Algérie française, c’est-à-dire l’intégration avait été impossible hier en Algérie, cela signifierait que cette même intégration est impossible aujourd’hui en France. Ce serait, en l’occurrence, une prise de position lourde de conséquences. Un constat de décès, à moyenne échéance pour la réalité française telle que nous la connaissons encore aujourd’hui. C’est la raison pour laquelle je montre du doigt, une fois de plus, un discours prononcé à Grenoble, vers la fin du quinquennat précédent par le président de la République dans lequel celui-ci affirma faire le constat de « l’échec de l’intégration ». Terminologie riche d’un pessimisme capitulard. En réalité, terminologie utilisée par quelqu’un qui ignore la portée des mots dont il fait usage.

Car si l’intégration nécessaire en France aujourd’hui échouait, ou plutôt si l’intégration nord-sud, rigoureusement vectorisée du nord vers le sud, ne pouvait exercer ses effets en France, alors nous aurions à subir l’autre intégration, l’intégration sud-nord, c’est-à-dire dans cette circonstance, une intégration rigoureusement vectorisée du sud vers le nord. Ce serait dans cette nouvelle occurrence, la fin de la France, en tant que nation occidentale majeure. Ce serait, dans des délais relativement proches, la prise du pouvoir en France, par l’ennemi déclaré de l’Occident : l’arabo-islamisme fondamentaliste, l’arabo-islamisme conquérant.

 

            Napoléon III avait-il pressenti cette évolution, ou plutôt ce risque de 1852 à 1865 ? Qu’a-t-il dit en réalité ?

 

En 1851, il déclare : « L’Algérie est un boulet attaché à la France ».

Je n’ai pas d’informations précises me permettant de situer la date exacte de cette affirmation durant l’année 1851. Nous savons que le 1er décembre 1848, le futur Napoléon III avait été élu à la présidence de la IIème République. A-t-il prononcé cette phrase avant le coup d’état du 2 décembre 1851 qui lui permit d’instaurer un régime autoritaire ? Qui se transforma en « Second Empire », le 2 décembre 1852 ?

Une constatation est à retenir : dans cette succession d’évènements, le futur Napoléon III n’avait pas négligé l’armée d’Afrique. Si on accorde foi aux écrits de Pierre Dominique remontant à plusieurs décennies, il aurait usé de son influence pour octroyer des commandements prestigieux au général de Saint-Arnaud. De manière à augmenter le renom de celui-ci, lui conférant par ce biais l’autorité suffisante pour assurer le succès du coup d’Etat de décembre 1851. Rappelons que ce futur maréchal de France, durant la guerre de Crimée, remporta sur les Russes la célèbre bataille de l’Alma en 1854.

Il est difficile d’attribuer à ce propos de style salonnard, une importance historique majeure. Propos qui d’ailleurs ne manqua pas d’être repris dans une exhibition de volupté malsaine, par De Gaulle en 1960 : « l’Algérie, un boulet attaché à la France depuis 130 ans ».

 

            En 1852, Napoléon III, empereur des Français dans quelques semaines a fait une nouvelle déclaration. Celle-ci provoqua de la part du ministre chiraquien  que j’évoquais plus haut, un commentaire formulé sur un ton d’une quiétude telle qu’il a banalisé ce propos prêté à Napoléon III, comme s’il s’agissait d’une vérité à la fois indiscutable et surtout banale. J’insiste sur ce dernier qualificatif de « banale ».

Ce propos « prêté » à Napoléon III, en a fait délirer beaucoup d’autres. De quoi s’agit-il ? Napoléon III aurait donc déclaré :

« l’Algérie c’est un royaume arabe ».

Or, il est absolument certain que Napoléon III n’a jamais dit et surtout n’a jamais écrit « l’Algérie c’est un royaume arabe ».

Ce que Napoléon III a déclaré en 1852 c’est ceci :

« L’Algérie est un royaume arabe que la France doit assimiler ».

Permettez-moi de souligner qu’il s’agit là d’une affirmation bien différente de celle que l’on nous propose habituellement avec beaucoup d’imprudence et de désinvolture.

Deux notions clairement exprimées, sont à relever dans cette affirmation :

celle de « royaume arabe » évidemment et celle « d’assimilation »

 

            En 1852, Napoléon III, tout particulièrement par ces mots de « royaume arabe », exprime l’importance que revêt en Algérie la phénoménologie arabe, même s’il ne connaît pas encore cette dernière.

Un pays qui n’avait rien d’arabe jusqu’au VIIème siècle, serait devenu en quelques siècles un royaume arabe ! Par quel procédé ? Par le moyen d’une conquête arabe d’est en ouest suivie d’une conversion autoritaire à l’islam des populations autochtones ?

Certainement pas !

Car les invasions arabes, les grandes chevauchées fantastiques et prestigieuses de la cavalerie arabe d’est en ouest, sont du domaine de la légende.

L’islam fut prêché au Maghreb du VIIème siècle par des migrants animés de leur foi qui ont trouvé sur place une population particulièrement disposée à rallier « la voie droite », prescrite par le prophète de la Mecque et de Médine. Comme l’a souligné récemment un auteur spécialiste du coran et de la langue arabe, prestigieux enseignant universitaire : « avec le Coran, livre sacré de l’Islam, Mahomet a converti les Arabes au monothéisme et jeté les bases de l’unification arabe ».

Avec timidité mais avec conviction, il nous faut proposer une ampliation à cette affirmation en apportant quelques rappels et précisions.

Mohamed, quand il s’exprimait, ne le faisait pas en langue arabe littérale. C’est une vérité établie depuis fort longtemps. En particulier depuis le congrès orientaliste international qui s’est tenu à Alger en 1905. Lors de ce congrès, devant un aréopage de spécialistes mondiaux des langues sémitiques, orientales et de la langue arabe, le professeur Vollers de la faculté d’Iéna, a démontré en substance que Mohamed, comme la majorité des habitants d’Arabie, ne s’exprimait pas en langue arabe littérale. Mohamed s’exprimait vraisemblablement dans le dialecte du Hedjaz, le Koraïchite. Après sa mort, le 3ème Calife Otman décida, autoritairement, que désormais le coran allait être enseigné en langue arabe littérale. En particulier sur les territoires du Proche et du Moyen-Orient, où le Coran était diffusé en grec, au sein d’une intelligentsia et de peuples caractérisés avant tout par leur hostilité à la tradition catholique apostolique et romaine. Le professeur Montet de l’université de Genève, a écrit au début du XX siècle que lors de « l’édition » décidée par le 3ème calife au VIIème siècle le coran fut diffusé autoritairement et exclusivement en langue arabe. A partir de « l’édition » du 3ème calife, seule la langue arabe devint « l’expression autorisée du coran ». Une expression désormais « ésotérisée ». A partir de cette décision, tout musulman est arabisé c’est-à-dire identifié à un arabe quelle que soit son origine ethnique. En particulier en Espagne, dans le Sud de la France, au Caucase, en Asie, en Afrique noire, il sera identifié par des patronymes arabes et mettra en œuvre, lui-même, l’effacement définitif et volontaire de ses patronymes et prénoms d’origine. Tous se déclareront arabes. Arabe, adjectif et substantif désignant ainsi un adhérent à la parole du rasoul Mohamed. C’est ce que l’auteur universitaire que je citais plus haut soulignait lorsqu’il écrivait : « Mohamed a jeté les bases de l’unification arabe ». Mise en œuvre par Otman, grâce à l’impact de la langue et des « psalmodies sans cesse renouvelées ». D’autres auteurs ont fait de la langue arabe « la substance phonique de l’islam » qui détient en elle-même le pouvoir d’assurer le monolithisme du bloc arabo-islamique.

 

En Algérie, lorsque l’Islam est apparu, des religions disparurent, d’autres survécurent en se soumettant à la dhimmitude.

Ceux qui étaient païens ne trouvèrent aucun motif à s’opposer à l’islam par la guerre.

Les Berbères de confession juive, fils d’Israël, convertis depuis des siècles et des siècles par les descendants d’une très ancienne diaspora animée d’un prosélytisme vigoureux et efficace, restèrent majoritairement juifs. Ils prirent les armes à maintes reprises contre les musulmans. A l’instar de la prêtresse juive la Kahena, héroïne des Aurès.

Les chrétiens apostoliques et romains fidèles au dogme de la sainte Trinité, aux enseignements du Concile de Nicée de 325, et aux enseignements du Concile de Chalcédoine de 451 qui précisait la double identité du Christ, survécurent en tant que chrétiens pour une très faible proportion d’entre eux. Ils connurent comme les juifs, la dhimmitude imposée par l’islam.

Les ariens, disciples de l’évêque hérétique Arius dont le culte avait été véhiculé majoritairement par des Goths, les Vandales en particulier, disparurent tous. Pourquoi ? Parce que, dans leur immense majorité, ils adhérèrent volontairement à l’islam.

Ils trouvèrent dans la Schahada, c’est-à-dire la profession de foi des croyants, une confirmation de leur propre crédo :

« il n’y a de dieu que Dieu et Mohamed est le rasoul, l’envoyé de Dieu ». C’est la Schahada.

 « il n’y a qu’un seul Dieu unique et sage à nul autre pareil ». C’est le dogme des ariens, disciples d’Arius. Profession de foi unitaire s’opposant avec férocité aux trinitaires fidèles de la tradition apostolique et romaine dont le fondement s’exprime ainsi : « Jésus c’est le fils de Dieu ».

Ce peuple arien constitua un énorme renfort à la massification du monde musulman. A la massification précoce des arabes en tant que peuple vecteur humain de la foi du Prophète.

Les envahisseurs arabes, où sont-ils ? Qu’en est-il des prestigieuses chevauchées de la cavalerie arabe ?

Des légendes.

L’islam a trouvé chez les unitaires ariens maghrébins et ibériques, une masse religieusement favorable, ou plutôt préalablement acquise, à l’épanouissement musulman. Ces peuples n’eurent aucun besoin d’envahisseurs pour adhérer à l’islam. Qu’ils ont rejoint avec enthousiasme dans le but prioritaire de combattre avec efficacité le dogme de la Sainte Trinité.

J’ai soutenu à maintes reprises que l’islam avait rebondi en Afrique du Nord sur les rives de l’Atlantique. Pour se répandre secondairement vers l’est, avec plus d’efficacité, grâce à ce rebond. Permettez-moi de m’expliquer, au mieux possible, sur cette notion d’onde de retour islamique qui me passionne et qui n’intéresse personne jusqu’à ce jour.

Au cours du Xème siècle, des migrants mauritaniens, des Berbères connurent une situation de désastre économique telle, qu’ils furent dans l’obligation d’émigrer en masse. Vers le nord-est tout d’abord, c’est-à-dire vers le Maghreb. Ils étaient guidés par des « moines » très religieux qui avaient adhéré très tôt au message du prophète de la Mecque et de Médine. Ils s’attachèrent, eux qui étaient Berbères, à s’exprimer exclusivement en langue arabe littérale qu’ils avaient parfaitement étudiée. Ils organisèrent un enseignement religieux, très rigoureux, délivré par des talebs dans des constructions fortifiées, les « ribats ». Par le moyen de la langue arabe, de la « substance phonique » qu’elle véhiculait avec ses « cadences sans cesse renouvelées », ils dominèrent progressivement les territoires voisins et convertirent les peuples qui y vivaient. Des peuples déjà conditionnés et partiellement convertis dans le Maghreb depuis le début du VIIIème siècle par l’intermédiaire d’une imprégnation islamique de voisinage.

A partir de l’ouest, ils définirent  un  nouveau courant d’islamisation, beaucoup plus profond et beaucoup plus rythmé, qui leur permit de prendre le pouvoir et de régner sur le Maghreb et l’Andalousie de 1061 à 1147. Ce fut le royaume almoravide.

Cette mouvance almoravide, islamo-berbère fondamentaliste, s’arabisa à outrance. Elle conféra une réalité et une vigueur historique considérable aux notions « d’onde de retour islamique » et de « phénoménologie arabe » ainsi que « d’unification des Arabes ». Quelle que fût l’origine ethnique des peuples concernés, elle enrichit d’une grande vigueur, en même temps que d’une forte réalité historique, le phénomène d’arabisation.

Cette succession de réflexions permet de comprendre que les notions d’arabe et d’arabisme sont dépourvues de toute composante ethnique nécessaire. Mais elles sont riches d’une signification messianique identitaire, expansive et colonisatrice.

L’Algérie fut religieusement et dogmatiquement arabisée. C’est en ce sens qu’il faut comprendre « l’observation historique » ou plutôt le « diagnostic historique » de Napoléon III quand il constata en 1852 que finalement :

« L’Algérie est un royaume arabe ».

Il précisa aussitôt, comme s’il voulait souligner la difficulté de la tâche qu’il voulait, qu’il devait entreprendre :

« Un royaume arabe que la France doit assimiler ».

Il avait clairement évalué la difficulté réelle de cette tâche. Mais en aucun cas, pour lui, cette difficulté ne devait être considérée comme un obstacle insurmontable, définitif.

L’assimilation que proposait Napoléon III (un royaume arabe que la France doit assimiler) est celle qu’Omar Smaïl voulut combattre plus tard en 1920.(2)

La volonté d’assimilation exprimée par Napoléon III, correspondait en réalité à un processus de sécularisation. Cette même sécularisation qu’il faut chercher à promouvoir en France aujourd’hui car elle est indispensable à l’intégration nord-sud, dont l’échec est interdit sous peine de mort pour la France. Encore faudrait-il être capable, de toute urgence, de libérer la France de ce que Peyrefitte appelle « une crispation confessionnelle » qui définit en elle-même un redoutable facteur d’involution économique.

 

            En 1865, 13 ans plus tard, Napoléon III est revenu sur cette notion de « royaume arabe ». Cette insistance démontre l’importance que lui-même attribuait à son propos. Il déclara :

« L’Algérie est un royaume arabe, une colonie européenne, un camp français ».

Constat d’échec ou plan d’action ?

Ce propos ressemble plutôt au constat d’une situation qui lui paraît figée et sur laquelle il ne disposait pas encore des moyens d’intervenir pour corriger cette paralysie historique momentanée.

Un royaume arabe. C’est-à-dire une Algérie soumise à la phénoménologie arabe. Un monde islamo-berbère unifié et rallié culturellement et totalement à l’arabisme selon l’ambition du 3ème calife au VIIème siècle.

Une colonie européenne. Celle-ci en illustre le rayonnement, la richesse, après en avoir garanti la survie. Colonie européenne qui assure la sécurité sanitaire du peuple de ce gigantesque territoire. Une colonie européenne courageuse, animée d’un esprit d’entreprise que les ennemis de l’Algérie française entêtés et forcenés qu’ils soient gaullistes ou gauchistes, refusent de reconnaître dans un esprit partisan révélateur d’un infantilisme politique et durable qui peut être mortel.

Un camp français. Tout cela ne peut vivre, ne  peut durer, que grâce à une armée nationale française, dont la mission est d’assurer la sauvegarde de ce territoire. Territoire qui aurait été progressivement et intelligemment structuré pour devenir la base géopolitique et humaine d’une construction eurafricaine d’inspiration occidentale. Construction qui aujourd’hui s’inscrit dans le domaine du rêve. Une construction eurafricaine au sein de laquelle il eut été possible de conférer son essor et pourquoi pas son rayonnement, à un œcuménisme laïque dont le monde moderne a grand besoin.

 

De cette première partie d’étude, nous retenons l’identité de l’écueil qui s’opposait au rayonnement de l’Europe vers l’Afrique, grâce à la France et à l’Algérie et qui n’était pas infranchissable. Cet écueil c’était le fondamentalisme islamo-berbère progressivement installé et implanté en Algérie, dans la première partie du XXème siècle. Implantation opérationnelle grâce à des complicités ultérieures et successives, dont le gaullisme s’illustra comme la plus efficace et la plus néfaste pour la nation française, pour l’Occident.

 

 

DEUXIEME PARTIE

La mise en action de la conjuration religieuse.

Connaissance de l’affaire « El Okbi ».

 

 

            Pour conférer à la conjuration contre l’Algérie française, toutes ses chances de plein succès, il a fallu favoriser et surtout assurer l’essor d’un intervenant opérationnel majeur. Il s’agit de l’intervenant arabo-islamiste ou plutôt du fondamentalisme islamo-berbère. Nous venons de l’évoquer dans la première partie de cette étude.

La mise en action fondamentaliste s’exerça dans une double perspective opérationnelle.

Tout d’abord, une perspective immédiate, qui s’identifia plutôt à un prétexte : contrer théoriquement la loi du 4 février 1919(3).

Mais surtout une perspective plus lointaine, en réalité une finalité permanente : l’exclusion définitive de la France du territoire algérien.

Quand nous disons « exclusion » de la France, nous nous référons plus particulièrement à l’anéantissement historique du génie français. Et pourquoi pas, de l’âme française.

Dans la logique de cette perspective, est-il raisonnablement envisageable que l’un des buts prioritaires de l’arabo-islamisme fondamentalisme soit d’expulser l’âme française, le génie français, hors des frontières actuelles de la France ?

C’est-à-dire, d’un point de vue plus pragmatique et général, bouleverser à plus ou moins longue échéance, l’identité et surtout la réalité historique de la France.

Le fondamentalisme islamique et conquérant a tiré un indiscutable profit de l’impact opérationnel de ses alliés français. Nous nous référons à la gauche française en 1956. Mais aussi à la gauche française de 1936 comme nous le rappellerons dans cette même étude.

Avant tout, le fondamentalisme islamique tira un avantage opérationnel, décisif et terminal de ce qui fut son allié principal, son promoteur historique ultime : le gaullisme. A travers la personne de Charles De Gaulle. Dès 1943.

En ce qui concerne l’homme de Colombey, nous avons souligné à 1000 reprises « la rigueur hargneuse », » la sécheresse corrosive » et « la constance obsessionnelle » du plan d’attaque mis en œuvre contre l’Algérie française.

Plan d’attaque inspiré par les USA rooseveltiens et mis en pratique en Algérie par Murphy, représentant personnel de Roosevelt à Alger depuis 1940 et soutenu par l’Angleterre. Murphy, diplomate catholique pratiquant, écrit lui-même que Roosevelt l’avait expédié en Algérie pour étudier les possibilités et les modalités d’un débarquement US en AFN : en décembre 1940. Il avait recommandé à Murphy de fréquenter assidument le général Weygand. Il lui avait même prescrit dans cet esprit, d’aller à la messe avec lui. Ce plan d’attaque contre la France en AFN eut un préalable opérationnel incontournable : l’assassinat de l’amiral Darlan à Alger le 24 décembre 1942. Assassinat aux conséquences exhibées aujourd’hui par l’histoire qui ne fait pas de cadeau. Conséquences qui expliquent la malédiction à laquelle je voue personnellement tous les exécuteurs, auteurs et complices de cet assassinat, aujourd’hui encore.

 

J’ai toujours pris soin de ne pas confondre l’islam, la religion musulmane avec l’arabo-islamisme fondamentaliste.

L’islam définit, pour les croyants, un cheminement vers la connaissance de Dieu dans le respect de Sa loi. L’arabo-islamisme fondamentaliste définit une logique de guerre et de conquêtes qui se sert de la religion comme moyen pour parvenir à la domination finale du monde.

En Algérie, l’arabo-islamisme fondamentaliste a voulu imposer un diktat spirituel à la France. Il en va de même aujourd’hui. Diktat qui fut imposé à la France en Algérie, entre 1920 et 1931. Diktat qui permet de comprendre la volonté conquérante de l’islamisme-fondamentaliste islamo-berbère qui se structura en Algérie.

Deux possibilités étaient offertes aux musulmans en Algérie française.

Première possibilité : l’islam décidait de s’adapter aux institutions françaises. De se séculariser. Dans cette éventualité tout était possible hier en Algérie de la même manière que tout est possible aujourd’hui et demain en France et en Occident, grâce à la sécularisation.

Deuxième possibilité : l’islam décidait hier et décide aujourd’hui que les institutions françaises devaient et doivent se soumettre aux exigences de la charria. Dans cette seconde éventualité, la France était inéluctablement condamnée à mort hier en Algérie. Elle court un danger identique aujourd’hui sur le territoire métropolitain.

En Algérie, en toute connaissance de cause, le général De Gaulle s’est rallié à la seconde alternative car il était soumis depuis longtemps aux exigences opérationnelles et néo-capitalistes de la secte pompidolienne.

Cette volonté de nuire de la part de l’anti-France en Algérie, permet de comprendre la promotion privilégiée, j’ai même écrit inflationniste, qu’a connue la religion musulmane en Algérie. Promotion qui fut à l’origine d’une « crispation confessionnelle » latente, permanente et surtout paralysante. Nous avons fait référence à Alain Peyrefitte quand il enseignait au Collège de France, que le développement économique était sévèrement compromis à l’intérieur des Etats qui acceptaient de voir se développer en leur sein une crispation confessionnelle permanente. Celle-ci est un facteur très lourd de sous-développement.

Dopé par l’attitude rigoureusement anti-chrétienne, plutôt anticatholique des gouvernements de la IIIème République, le fondamentalisme islamo-berbère se structura à partir de 1930. Deux évènements déclencheurs, ou plutôt retenus comme occasions de son entrée en action, méritent d’être rappelés.

En 1930, se déroula à Carthage, en Tunisie,  un congrès eucharistique. Les catholiques, en cette occasion, manifestèrent en public la profondeur de leur foi. Ils exhibèrent les portraits de notre grand Saint Louis, mort devant Carthage le 25 août 1270. La foi catholique s’exprima sans retenue en Tunisie, sur une terre qui était très proche du lieu de naissance de Saint Augustin et de l’un de ses disciples, Saint Fulgence.

L’histoire de ce dernier personnage est fort utile à connaître. Elle révèle en effet la raison pour laquelle ce congrès eucharistique de 1930 en Tunisie, ne pouvait être toléré sans riposte de la part des islamistes fondamentalistes.

Fulgence, fils de sénateur, était originaire de Tunisie. Né en 465 il fut un disciple très proche de Saint Augustin. Il vécut, en le subissant, le pouvoir à la fois militaire et religieux des Vandales. Envahisseurs avant tout idéologiques et religieux, Hunéric et Thrasamund, étaient en effet des monarques ariens intégristes. Ils s’employèrent à persécuter l’église moyenâgeuse qui se développait dans le Maghreb. Ils éliminaient physiquement ceux qui n’étaient pas ariens. Nous sommes au Vème siècle. Ils déportaient tous les clercs et tous les laïques et confisquaient leurs biens. Ils imposèrent aux chrétiens du Maghreb la conversion à l’arianisme qui, nous le savons d’abondance, nie la divinité de Jésus. Dans cet esprit, aux Vème et VIème siècles, l’arianisme combattait avec fanatisme la tradition apostolique et romaine. Pour mener ce combat au meilleur résultat possible, ces monarques vandales et ariens, firent appliquer avec sévérité, l’Edit de Représailles du 25 février 484. Fulgence fut exilé en Sardaigne. Il écrivit de nombreux textes qui se rapportaient aux persécutions ariennes de l’époque. Il mourut en 533. Entre-temps, il sauva les cendres de Saint Augustin que les ariens voulurent brûler et disperser aux quatre vents. Avec d’autres évêques il transporta la dépouille augustinienne en Sardaigne où elle séjourna pendant un certain temps.

En 1930, cette terre tunisienne semblait être imprégnée d’une mémoire historique de cet évènement. Car tout se passa comme si elle était devenue la terre choisie par les successeurs idéologiques des ariens, les islamistes, lorsque ceux-ci fondèrent l’université de la Zeitouna sur ce même territoire. Celle-ci devint un centre de rayonnement de l’islamisme conquérant. Les oulémas berbères algériens, en particulier, vinrent s’y instruire et bénéficier d’une formation qui fit d’eux des vecteurs opérationnels d’importance majeure de la transformation de l’islam algérien en islamisme fondamentaliste.

C’est sans doute à cause de cette mémoire historique que, lors du congrès eucharistique de Carthage en 1930, exhiber la Croix, les chapelets du culte marial, le portrait de Saint Louis l’ange des croisades, de sa mère Blanche de Castille et de son grand-père Alphonse VIII le Noble qui remporta la célèbre bataille de Las Navas de Tolosa en 1212, en Estrémadure contre les intégristes almohades…. c’en était trop, pour les ennemis de la France, de l’Algérie française et de la Croix. On hurla « au sacrilège ! » par des vociférations riches d’hostilité. Vociférations qui furent soutenues par la IIIème République française.

« Un peu de pudeur messieurs. Couvrez ces « saints » que nous ne saurions voir ! ».

Une tartufferie ? Non c’est plus grave. Un prétexte pour faire accepter une décision en 1931 qui fut mortelle pour l’Algérie française. Nous la connaissons, nous y reviendrons.

 

            1930, fut aussi l’occasion d’un autre évènement qui se déroula en Algérie cette année-là. Gaston Doumergue, président de la IIIème république, voulut conférer un éclat exceptionnel à la commémoration du débarquement de Sidi Ferruch du 14 juin 1830. Il avait été magistrat dans le Constantinois. Manifestement, Gaston Doumergue était tombé lui aussi sous le charme de la terre algérienne. On peut dire de lui, comme on l’a dit pour d’autres, que « l’Algérie lui était montée à la tête ».

Au défilé des anciens combattants de 14/18, se sont incorporés des milliers d’anciens combattants musulmans. Tout le monde est là. L’enthousiasme français est vécu. Enthousiasme chanté et surtout partagé. A cette occasion, des anciens combattants musulmans manifestent une aspiration : celle d’accéder à la citoyenneté française. Car, en vertu des attendus du Sénatus Consulte du 14 juillet 1865 et de la loi du 4 février 1919, ils étaient, certes, de nationalité française, mais ils n’étaient pas de citoyenneté française.

Ils sont soumis au Code pénal français et au Code constitutionnel. Depuis la loi de 1912, ils sont astreints aussi, au devoir de conscription. Mais ils ne sont pas astreints aux exigences du code civil français comme tous les autres citoyens français. Ils ne sont donc pas encore citoyens. Ils sont officiellement des sujets français, terme choisi pour exprimer leur identité de « non citoyens français ». Identité qui résulte de leur choix. Mais cela peut changer pour chacun d’entre eux, en quelques minutes. Théoriquement. En vertu des attendus de la loi du 4 février 1919, il leur suffit de se rendre dans le bureau d’un juge de paix. D’y prendre l’engagement par écrit de se soumettre aux exigences du code Napoléon. D’accepter un concordat avec le code civil français. Bref, se séculariser.

Mais Satan veillait encore une fois !

Au sein de l’enthousiasme indiscutable du centenaire, c’est ce courant francophile que voulurent endiguer d’urgence les oulémas islamo-berbères d’Algérie. Guidés par Ben Baddis, Ibrahim Bachir, Toufik El Madani, les plus offensifs, ils réagirent en 1931 par la création de l’Association des Oulémas, le 5 juin de cette année-là. Le 7 juin, Ben Baddis proclama le dogme de l’anti-France : « ma religion c’est l’islam, ma langue c’est l’arabe, ma patrie c’est l’Algérie ».

Cette association, se manifesta tout d’abord par une initiative de génie. Elle exigea la citoyenneté française. C’est ce que sollicita en apparence, Ben Baddis au Président de la République Albert Lebrun en 1932. Mais il exigea surtout que le code coranique fût validé pour les musulmans en lieu et place du code Napoléon. Il voulut implanter en France deux citoyennetés, chacune d’entre elles relevant d’un code civil différent. C’était impossible. Inacceptable. Ben Baddis le savait très bien. Il ne fut pas étonné du refus du président Albert Lebrun. Refus qu’il espérait. Il s’en servit en effet pour intenter un procès d’intention contre la France : « la France ne veut pas des musulmans ».

Ce qui était faux mais suffisant pour déclencher une dynamique de guerre de religion contre la France.

En particulier, en 1936.

 

            Au mois de juin 1936, le 2 très précisément, s’ouvrit à Alger un congrès musulman. Lors de la première réunion, tenue au cinéma « Majestic », Ben Baddis prononça un violent discours contre la France et réclama l’indépendance. Les esprits s’échauffèrent. Les masques tombèrent soudain. Le tonus verbal évolua rapidement vers le fanatisme. Les musulmans francophiles étaient désemparés. Nombreux furent ceux qui réagirent néanmoins avec une grande vigueur. Ils manifestèrent par des communiqués leur attachement à la France. Ils protestèrent contre cette convention indépendantiste. Ils démontrèrent en s’appuyant sur des documents et sur des chiffres que les inspirateurs et organisateurs de cette manifestation anti-française, étaient loin d’être majoritairement représentatifs de la communauté musulmane d’Algérie. Ils adressèrent une motion au gouvernement français et dénoncèrent tout logiquement la non-représentativité des organisateurs des réunions du 2 juin 1936 au cinéma Majestic à Alger et de la manifestation ultérieure du stade municipal d’Alger, le 2 août 1936. Car à la réunion du Majestic, succéda la manifestation du stade municipal dans une ambiance alourdie.

Sur le plan international par la guerre civile espagnole qui s’était déclenchée le 17 juillet 1936.

Sur le plan national par l’intervention du gouvernement du Front Populaire de 1936 qui salua et encouragea les manifestations hostiles à la France. En particulier, le 2 août au stade municipal.

Les partisans français de la communauté musulmane manifestèrent vigoureusement une fois de plus leur hostilité contre ces deux rassemblements. La riposte ne se fit pas attendre. Le 4 août 1936, donc 2 jours après la réunion du stade municipal, Mohamed Ben Dali, dit Kaoul, imam malékite de la mosquée d’Alger, qui avait manifesté son opposition aux indépendantistes le 2 juin au Majestic et le 2 août au stade municipal, fut tué à coups de couteau dans la rue de la Lyre.

Par qui fut-il assassiné ?

Par un repris de justice, parfaitement connu de la police. Un tueur à gages. Cette notion de tueur à gages est fondamentale à retenir. Ce n’était pas un militant qui avait été recruté pour tuer le cheik francophile de la mosquée d’Alger. Ce n’était pas un fanatique de l’islam. Akkacha, le tueur, était certes musulman, mais c’était un voyou. Il avait été recruté par les décideurs de l’assassinat à l’intérieur même de la prison de Barberousse. Il y purgeait une peine pour un crime de droit commun. Il fut payé avec de vulgaires billets de banque pour commettre son crime. Cet assassin fut rapidement identifié et arrêté.

A partir de cette arrestation un montage satanique fut élaboré pour compromettre dans l’esprit des musulmans (et dans l’esprit des Français non musulmans d’Algérie qui ignoraient tout et qui ignorent encore tout de cette affaire), une personnalité musulmane, un ouléma.  Il s’agit d’Ettayeb El Okbi. Personnalité sur laquelle je me permets d’insister pendant quelques lignes.

 

Lorsque se déroula l’arrestation d’Akkacha, celui-ci « parla » d’abondance. Il affirma spontanément qu’il avait été payé pour commettre ce crime, par le cheikh El Okbi. Aujourd’hui encore, je l’ai d’ailleurs écrit dans l’un de mes livres (4) j’ai l’intime conviction, plus encore la certitude, que les policiers qui interrogeaient Akkacha ignoraient tout de ce notable musulman qui venait d’être « spontanément » dénoncé par le tueur Akkacha.

El Okbi cheikh ! Je répète, Ettayeb El Okbi ! Impossible !

Il s’agissait d’un religieux profond né à Sidi Okba, en 1890. Un saharien, fils lui-même d’un grand religieux. A l’âge de 5 ans, son père l’emmena dans le Hedjaz en Arabie. Il y bénéficia d’une formation religieuse aux sources mêmes de l’islam. Il devint très rapidement un notable remarqué par le Chérif de la Mecque, Hussein. Celui-ci lui confia le rôle de précepteur de son fils Abdallah. Or, ce dernier devint plus tard le premier roi de Jordanie, c’est-à-dire le père d’Hussein de Jordanie, le grand-père donc du roi actuel Abdallah II.

En 1920, à l’âge de 30 ans, El Okbi rentra en Algérie. Il se révéla très vite comme un homme de dialogue. Très rapidement aussi, il devint un notable que les fondamentalistes estimèrent urgent de rallier à leurs organisations. Ils avaient besoin de ce religieux dont l’autorité morale et spirituelle était rayonnante.

En 1920, il fit donc partie des Cénacles d’Omar Smaïl (5). Il y fit la connaissance de Ben Baddis. Il participa à la vie du Cercle du Progrès mais finit par se brouiller avec Ben Baddis en 1925.

A cause de cette brouille, il fut tenu éloigné des activités du Cercle du Progrès.

Après la naissance de l’association des Oulémas en 1931, il devint l’objet de nouvelles et pressantes manœuvres d’approche de la part de Ben Baddis. El Okbi en effet, était une personnalité très écoutée dans le monde religieux musulman. On ne pouvait le tenir à l’écart. Cependant, il ne s’inscrivait jamais dans une attitude anti-française. Sa terminologie religieuse restait très ouverte et conviviale. Quand il lui arrivait d’évoquer le nom de Jésus c’était avec un profond respect. Quand il parlait de la Mère de Jésus, il exprimait une grande vénération pour la « Sainte Vierge Marie ».

Malgré cette attitude, Ben Baddis ne pouvait se passer de lui dans son association. El Okbi se vit attribuer, dans ces conditions très particulières, le titre de secrétaire général adjoint de l’association des Oulémas.

Cette fonction lui imposa de participer au congrès musulman de 1936.

Le 2 juin, au Majestic, surprise ! Il déclara : « nous sommes des Français musulmans ». Et dans la suite de son propos, au grand dam de ceux qui l’avaient supplié de prendre la parole à cette réunion, il se révéla être un champion de la convivialité spirituelle au sein de la totalité de la population française d’Algérie. « Algérie, terre française, parce que Dieu l’a voulu » soutenait-il en substance.

Aujourd’hui encore, la question obsédante est celle-ci : comment imaginer qu’une telle personnalité puisse être compromise, « mouillée » dans l’assassinat d’un notable religieux musulman ? Assassinat accompli par un tueur à gages payé avec de l’argent liquide. Mais Akkacha persista : « c’est El Okbi qui m’a payé pour tuer Kaoul le 4 août 1936 ».

El Okbi fut logiquement arrêté. Placé immédiatement sous mandat de dépôt. Un peu plus tard, Akkacha fut confronté avec El Okbi sur décision du juge d’instruction. Il se rétracta formellement, en affirmant sans ambiguïté : « Je n’ai jamais vu cet homme de ma vie ! ».

Donc, logiquement, on peut certifier qu’un quidam s’est servi de l’identité d’El Okbi pour engager Akkacha dans l’assassinat du cheikh francophile de la mosquée d’Alger. Après la confrontation, le juge d’instruction devant l’évidente nullité des charges, rendit une ordonnance de non-lieu.

C’est alors que la conjuration satanique contre l’Algérie française, s’exerça, animée d’une redoutable pugnacité : le parquet fit appel !

Le parquet exprime normalement la volonté du gouvernement. Le parquet est serve dans ses écritures. C’est donc bien le gouvernement de la IIIème république qui s’opposa en 1936 à la mise en liberté d’El Okbi.

Celui-ci fut donc logiquement et officiellement renvoyé devant une cour d’assises par la cour d’appel d’Alger. A Tizi-Ouzou. En Grande Kabylie. Parce que l’on redoutait une atteinte à l’ordre public à Alger. On était en effet sous le coup des manifestations du stade municipal du 2 août 1936 et de la contre-manifestation déclenchée par les patriotes français d’Alger.

Devant un dossier d’accusation vide de toute charge et preuve, El Okbi fut acquitté. Des griefs sévères furent formulés par le président de cette cour d’assises contre le parquet et la cour d’appel d’Alger qui avaient renvoyé devant la cour d’assises un homme de toute évidence innocent. Quant à l’assassin de Kaoul, Akkacha, il fut condamné aux travaux forcés à perpétuité.

A partir de cet acquittement, les « ultras » (on ne les appelait pas ainsi à cette date car défendre la France pour un Français, c’était encore dans le domaine du normal) se déchaînèrent et crièrent à la trahison. Contre l’indulgence du tribunal. Car personne parmi eux n’était instruit de la personnalité réelle d’El Okbi. Nous avons été, nous Pieds-Noirs, ignorants pendant trop longtemps de beaucoup de vérités et de réalités concernant l’Algérie française.

Et puis…. Léon Blum chuta. Daladier devint président du conseil. La situation internationale s’alourdissait. La guerre menaçait. On oublia l’affaire El Okbi dont la majorité de nos concitoyens n’a jamais entendu parler…. aujourd’hui encore.

 

            La question qui se pose près de 8 décennies plus tard est bien celle-ci :

« qui avait avantage à provoquer la mise en accusation d’El Okbi ? »

Question qu’il faut enrichir par l’affirmation complémentaire suivante :

« tout en sachant qu’il serait acquitté ».

Oui, résumons la question : « Pourquoi El Okbi ? »

C’était dans le but exclusif de le déconsidérer parmi les islamistes certes, mais aussi au sein du monde des croyants, eux-mêmes conditionnés par l’influence fondamentaliste. Car la loyauté d’El Okbi à l’égard de la France était connue. « Nous sommes des Français musulmans » avait-il osé déclarer au Majestic le 2 juin 1936. Il lui arrivait en maintes occasions, de manifester sa réticence contre le cérémonial servile, le « jaïlala » comme il le disait lui-même. La profondeur de sa foi associée à son ouverture d’esprit, comportait pour les ennemis de la France et les ennemis de l’Occident, un énorme risque : faire de lui, un jour, un pont culturel et spirituel entre les musulmans d’Algérie et le reste des Français d’Algérie et d’ailleurs. Il représentait l’antithèse de Ben Baddis qui l’avait néanmoins recruté parce que l’on ne pouvait pas se passer de la caution que représentait sa présence au sein du bureau directeur de l’association des oulémas. Il était donc nécessaire de le contrôler d’abord. Pour le mettre « hors-jeu » en deux temps.

Premier temps : on le compromit officiellement dans l’affaire de l’assassinat du cheikh Ben Dali.

Deuxième temps : on se servit de son acquittement pour le dénoncer à bas bruit, par insinuations, comme un partisan de la France, « contre laquelle il se refusait à combattre ». « Si la France l’a acquitté, cela signifie qu’El Okbi est un ennemi de l’indépendance ». C’était en cela que consistait l’essentiel de l’argumentation sournoisement répandue.

Aigri, retiré de toute activité officielle après son acquittement, El Okbi se manifesta plus tard, au sein d’une association : « l’Union des Croyants Monothéistes ».

Ce mouvement qui avait l’ambition de définir les modalités de parvenir à une convivialité interconfessionnelle, qu’il estimait possible et surtout nécessaire, entre juifs, chrétiens et musulmans, connut une existence très confidentielle. Personne n’en fait état de nos jours. El Okbi mourut diabétique et aveugle à Saint-Eugène. Personne n’évoque son nom.

Je me suis permis de relater, en le résumant, cet épisode volontairement occulté de notre histoire. Il démontre qu’hier comme aujourd’hui, tous les partisans du dialogue inter-religieux, et j’ose le dire, les partisans de la sécularisation de l’islam, ont été l’objet, et sont toujours l’objet, d’attaques sournoises et conjointes de la part des pires ennemis de la France. Ces derniers furent soutenus en maintes occasions par des gouvernements qui, dans une interprétation perverse du dogme de la laïcité, soutenaient, en priorité, tous les comportements religieux qui se confirmaient comme un redoutable danger pour le christianisme. Pour eux, la laïcité était avant tout synonyme d’antichristianisme militant et offensif.

L’arabo-islamisme fondamentaliste connut le privilège de devenir ainsi l’arme tactique majeure que le capitalisme financier a cru pouvoir manipuler. La finalité économique poursuivie par celui-ci, était exprimée clairement dans la volonté forcenée de se décharger, « de se délester », d’une obligation : celle d’assurer l’avenir sanitaire, social et politico-économique des anciens peuples coloniaux. Nous confirmons cette conviction en exprimant que le capital financier a voulu démontrer en s’appuyant sur une argumentation à prétention scientifique, l’impérieuse nécessité de se libérer définitivement de l’obligation d’assurer l’avenir de ces peuples, quitte à conférer toute sa vigueur révolutionnaire à un nouveau courant idéologique universel, dont le but affirmé est de parvenir à la domination finale du monde.

La mise en œuvre planétaire de ce nouveau moyen révolutionnaire, lui-même identifié comme une conséquence de l’abandon de l’Algérie par la France, fut initiée opérationnellement durant les années 1972-1973-1974. C’est-à-dire durant les années dites du choc pétrolier.

Celui-ci conféra une telle vigueur économique et financière aux potentats fondamentalistes qu’il a propulsé l’islamisme au rang de partenaire économique, majoritaire aujourd’hui, dans l’entreprise permanente, exhibée sans camouflage, sans artifice, d’anéantissement de l’Occident chrétien.

Le capitalisme financier a tenu le rôle d’un apprenti sorcier quand il a cru trouver en De Gaulle un agent d’exécution, d’efficacité majeure. Il attribua à celui-ci les moyens de mettre en application historique son plan satanique d’assassinat de l’Algérie française, expression opérationnelle majeure des convictions anti-occidentales de l’homme dit du 18 juin.

 

 

TROISIEME PARTIE

 

« Le cœur du monde »

 

            Cette étude se proposait un but prioritaire : démontrer à quel point les gouvernements français, à l’instar d’un monde occidental devenu capitulard, observèrent la plupart du temps une attitude de respect obséquieux à l’égard de l’islamisme conquérant moderne.

Celui-ci a trouvé « le terreau » nécessaire et indispensable à son impact universel et surtout actuel dans « l’assassinat de l’Algérie française » accompli en 1962. Je ne fais que citer, en cette occurrence, le titre que j’ai proposé, en accord avec mon éditeur Philippe Randa, pour mon dernier livre déjà publié (6).

 

            En Algérie française, l’islamisme fondamentaliste n’a pas été freiné, loin de là, dans son élaboration, son développement et son rayonnement. Il a joui sans marchandage d’une tolérance bienveillante. Dans la meilleure des hypothèses, disons qu’il a tiré profit d’une complicité déguisée en imprudence innocente de la part des autorités administratives françaises.

En revanche, la volonté de sécularisation exprimée par  ceux des musulmans qui aspiraient à l’intégration, à la citoyenneté française avec son corollaire d’acceptation du code civil français, n’a jamais bénéficié du soutien de la IIIème République… et des suivantes.

A cette attitude, je ne vois qu’une seule explication : la laïcité était interprétée avant tout, à cette époque, comme une volonté d’opposition prioritaire au catholicisme apostolique et romain. Les laïcs de cette époque mettaient ainsi en application un vieil adage que je me permets de rappeler : « l’ennemi de mon ennemi est mon ami ».

Ils ne combattaient pas le fondamentalisme islamo-berbère d’Algérie, pour la raison que celui-ci s’affirmait, avant tout, comme l’ennemi du christianisme. Dialectiquement, ces laïcs intégristes se sont inscrits dans le camp du fondamentalisme islamo-berbère.

Ce vécu pervers du dogme de la laïcité ne manqua pas de générer des conséquences dont nous n’étions pas capables de mesurer la gravité à cette époque. D’un point de vue administratif, rien ne pouvait être officiellement opposé à l’islamisme fondamentaliste car celui-ci n’évoquait que Dieu. Il justifiait son combat « par la seule volonté divine ». Or, pour les responsables des IIIème, IVème et Vème Républiques, évoquer l’idée de Dieu ne constituait ni plus ni moins qu’un blasphème terminologique. Contre l’islamisme révolutionnaire, tout logiquement, ne s’opposait qu’un vide doctrinal qui privait le monde musulman francophile et « sécularisationniste » de tout support idéologique officiel pour participer avec efficacité à la défense de la France.

Le montage de l’affaire El Okbi, que j’ai résumée à votre intention, illustre une manœuvre de haut vol, pour anéantir un potentiel de sécularisation de la part d’une personnalité éminente de l’islam. Ce cheikh manifesta sa volonté d’accepter la France, d’accepter que l’Algérie fût française. Cette conjuration judiciaire illustre une manœuvre conjointe des fondamentalistes islamo-berbères et des autorités gouvernementales françaises pour neutraliser un homme qui acceptait d’harmoniser sa foi avec les exigences historiques de la France. Exigences historiques synthétisées dans le dogme de liberté, égalité, fraternité.  « Nous sommes des musulmans français parce que Dieu l’a voulu » déclara-t-il en substance au cinéma Majestic lors de la célèbre manifestation du 2 juin 1936. Cet homme, je n’ose écrire ce saint homme, aurait mérité d’être soutenu par tout l’appareil administratif et militaire de la IIIème république. Celle-ci aurait dû le protéger d’abord, assurer sa promotion ensuite.

Mais de toute évidence, Satan veillait encore !

Il ne fallait pas entretenir l’illusion que l’Algérie pût devenir un jour une terre française au sein de laquelle la citoyenneté pleine et entière allait conférer tout son véritable sens au terme de laïcité. A savoir : un ensemble de conditions qui allait permettre aux religions de s’exprimer librement en France, dans la mesure, bien évidemment, où elles acceptaient de respecter les institutions françaises.

Pourquoi les institutions françaises méritaient-elles le respect des musulmans comme elles méritent le nôtre ? Parce qu’elles étaient l’expression de la volonté du peuple souverain. Le respect de ces mêmes institutions par les musulmans signifiait qu’ils auraient accepté leur place au sein de ce peuple souverain. A l’instar des juifs, des chrétiens et des non-croyants. C’était cela la sécularisation dans sa définition moderne : un concordat entre l’expression officielle et publique d’une foi et les exigences de la souveraineté nationale dans tous les domaines de la vie française. Aucune entrave n’était nécessaire, par conséquent, au vécu de la foi. Rien n’empêchait la mise en pratique des dévotions les plus totales, les plus pieuses, des uns et des autres, dans la mesure salutaire ou plutôt salvatrice où elles se pratiquaient dans le respect de la loi. Dans le respect de l’ordre public et de la liberté de ceux qui ne pratiquaient pas le même culte.

En 1936, le montage de l’affaire El Okbi révèle en réalité, je précise, révèle avant tout, une volonté contraire : le rejet par la France officielle des musulmans d’Algérie, par peur raciale des musulmans. Ce rejet ethnico-religieux, qui s’identifie très vite à un rejet raciste de la part des républiques françaises, de la part de De Gaulle, de la part des décolonisateurs, impliquait à moyen terme une évolution inexorable vers le rejet de l’Algérie par la Mère Patrie. Quitte à enrichir ce rejet du génocide du peuple pied-noir. Que la majorité de nos concitoyens aurait accepté l’âme sereine.

 

            L’abandon de cette terre, prévisible dès cette année-là, en 1936, entraîna de la  part d’une fraction du monde chrétien d’AFN, la volonté de « jouer » très tôt, le christianisme vaincu en AFN. De mettre en œuvre, très tôt des entreprises dites progressistes pour structurer un pseudo-christianisme qui acceptait, avant que ne fût consommée la défaite de la France, d’être soumis aux exigences de l’islamisme vainqueur. A Tibérine, comme ailleurs. Un progressisme qui, avant que ne débutât le combat, acceptait une nouvelle dhimmitude pour les chrétiens d’Algérie. Et aussi, implicitement, pour les juifs de ce territoire.

L’islamisme fondamentaliste et berbère est devenu, sans aucun doute, l’auxiliaire tactique majeur de l’anti-France en AFN.

Les chrétiens progressistes dans cette perspective de nouvelles catacombes, ne manquèrent pas de s’opposer tout particulièrement aux combattants volontaires et populaires de l’OAS, coupables de n’avoir pas accepté cette solution, qu’eux-mêmes, les chrétiens capitulards, avaient acceptée depuis longtemps, d’une paisible et très soumise dhimmitude des chrétiens d’Algérie. Dhimmitude exigée par le nouveau conquérant fondamentaliste.

En Algérie, aucune solution partielle n’était possible. C’était l’Algérie française ou la mort de la France en Algérie et en Afrique. Les solutions de partition, de fédération, de plates-formes oraniennes ou autres, exprimaient des utopies criminelles qui n’auraient eu qu’un résultat : multiplier par 10 ou par 100 les drames que connurent nos frères et nos sœurs d’Oran, le 5 juillet 1962.

 

            A partir du moment où les armes se turent à Alger, nous n’avions plus notre place en Algérie. Lorsque le cessez-le-feu dit de l’OAS fut accepté en mai 1962 par une fraction politiquement ambitieuse de l’OAS, sur injonction de Jacques Chevallier, l’ancien maire FLN d’Alger, c’était à la mort de la France en Algérie qu’ont mis la main les décideurs de ce cessez-le-feu. Je précise : du « déposez-les armes ».

En tant que responsable national de l’ORO, j’avais envisagé comme inéluctable un dernier combat que je préparais avec minutie et avec foi. Je pensais qu’un ultime message allait être adressé au monde à travers les combats de rue que nous nous apprêtions à livrer dans Alger la blanche.

En aucun cas je n’avais envisagé qu’un ancien frère d’armes, dont j’avais approuvé les contacts qu’il avait mis en œuvre avec l’Exécutif Provisoire dirigé par Farés, allait prendre la décision en catimini du cessez-le-feu au nom de l’OAS. Tout avait été bien minuté car cet ordre de cessez-le-feu fut transmis par radio. Cet ordre reçut immédiatement l’approbation d’Argoud qui avait prétendu faire toucher du doigt en cette circonstance, que la discipline de l’OAS algéroise s’était confirmée avec éclat à l’occasion de ce cessez-le-feu. Argoud oubliait qu’un des ordres les plus faciles à donner c’est celui de cesser de se battre. La détente s’installa au sein des effectifs et de la population algéroise. Les terrasses de café se remplirent à nouveau. On ne tuait plus et très imprudemment on imaginait que l’on allait cesser de mourir.

J’affirme ici, en toute simplicité, qu’à cette date, je n’avais rien prévu pour mon sort personnel. Je précise bien : je me suis trouvé confronté à cette réalité d’une décision dont celui qui l’avait prise a refusé de reconnaître devant moi qu’il en était le décideur. Chacun renvoyant la responsabilité de cette volonté d’arrêter le combat sur quelqu’un d’autre.

C’est l’un de nos deltas, parmi les plus prestigieux, qui est venu me dire :

« Deux éventualités : ou bien on s’en va, ou bien, il faut tuer les autres. Car eux, ne te feront pas de quartier ».

Provoquer encore des drames avec le sang des nôtres, de ceux qui hier encore étaient des vaillants, et qui avaient été abusivement séduits par les perspectives ambitieuses d’un obsédé de la politique, c’était une initiative à laquelle j’ai refusé de souscrire. Je suis parti 40 jours après le cessez-le-feu dit de l’OAS. Je suis parti d’une ville où l’on ne se battait plus. Où l’on enregistrait avec soulagement que le combat était terminé. J’ai pris soin de transmettre un ordre du jour à tous mes subordonnés de l’ORO. J’ai expliqué les raisons de mon départ qui s’est effectivement déroulé avec l’accord de tous les miens.

Je n’éprouve aujourd’hui, aucun état d’âme particulier à vous faire connaître mon sentiment à propos de la « fin d’Alger ».

Aurais-je, en 2012, l’imprudence, voire l’impudeur, de regretter cette dernière bataille que nous n’avons pas livrée ? Il est trop facile de répondre par la négative. Car, avec le recul et la sagesse des décennies qui se sont miraculeusement accumulées depuis le départ de juin 1962, j’ai accepté de comprendre enfin ce que beaucoup de responsables opérationnels m’ont mille fois affirmé depuis des années : « si nous sommes vivants aujourd’hui, c’est grâce à toi. Il fallait que tu partes pour nous laisser une chance de vivre encore ».

L’Algérie française est morte, vendue et assassinée. Il importait de sauver un effectif : celui des « vrais hommes » de l’Algérie française. Qui je l’espère, vont s’employer encore et encore, à défendre la mémoire de cette terre, ainsi que la mémoire de la dernière unité combattante française d’Algérie : l’OAS.

Celle-ci est morte.

Mais elle doit inspirer ceux qui au sein du monde occidental, tel que nous l’avons défini, sont encore animés de la volonté du sauvetage de l’Occident. C’est à eux, les anciens opérationnels de l’OAS, qu’il appartient de ne  pas abandonner le message que nous livre la mémoire de l’Algérie française aux seuls ronds de cuir, qui n’ont joué ni une heure, ni une minute de leur liberté, pour défendre cette terre.

 

Je rappelle la définition de l’Occident que je propose pour la millième fois. Au-delà de toutes les spéculations politiques, géopolitiques et philosophiques, l’Occident se définit comme : « l’espace de la terre où les chrétiens peuvent vivre libres et protégés contre toutes vexations, soumissions et entreprises de massacres collectifs ».

L’Occident, cet espace de vie définit pour nous le cœur du monde qui pour exister exige que se structure, sans précipitation, sans panique, sans fanatisme, mais avec foi et résolution

« Une volonté contre-stratégique universelle pour la vie de l’Occident ».

 

Jean-Claude PEREZ

Nice

Octobre 2012

NOTES

 

1 Le problème des nationaux français de confession juive, sera résolu en   septembre 1870 à   l’occasion du décret Crémieux. Voir prochaine étude.

2 voir étude précédente

3 voir étude précédente

4l’islamisme dans la guerre d’Algérie
5 voir étude précédente

6 voir la bibliographie sous-jaccente

 

BIBLIOGRAPHIE

 

Du même auteur  et chez le même éditeur :

L’assassinat de l’Algérie française, terreau de la conquête islamiste actuelle. 2012

Un des livres du cinquantenaire, à lire et à faire lire.

L’islamisme dans la guerre d’Algérie

Logique de la Nouvelle Révolution Mondiale, 2004

Le sang d’Algérie

Histoire d’une trahison permanente, 2006 ; 2e édition

Debout dans ma mémoire

Tourments et tribulations d’un réprouvé de l’Algérie française, 2006 ; 2e édition

Vérités tentaculaires sur l’OAS et la guerre d’Algérie

Stratégies et tactiques, 2006 ; 2e Edition

Attaques et Contre-attaques

Vérités tentaculaires sur l’OAS et la guerre d’Agérie II, 2008

 

 

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Mis en page le 04/10/2012 par RP