Bab-el-Oued
est une rivière et une carrière.
La carrière avait servi à bâtir tout Alger, mais
après la Conquête pour construire et reconstruire, il
fallut faire appel à des immigrants espagnols. Ceux-ci firent
souche et leurs enfants payèrent l'impôt du sang au cours
des deux guerres mondiales. Leur patrie était là où
ces jeunes plantes vivaces s'étaient profondément enracinées.
Jamais l'idée ne les avait effleurés qu'ils dussent
un jour l'abandonner. Bab-el-Oued,
c'est une ville dans la ville. Bab-el-oued,
vivante, bruyante, chaleureuse, celle du Paradis Perdu. C'est ce qui
explique l'attachement viscèral des ses habitants et leur détermination
farouche à défendre leur quartier, et avec leur quartier,
Alger et l'Algérie française.
C'est de Bab-el-Oued, qui a toujours voté
à gauche, que les mouvements de réaction à la
politique d'abandon programmée par De Gaulle furent les plus
virulents. En réponse à leur désir farouche de
vouloir rester français, dans une ville Française, dans
un pays Français, les Bab-el-ouédiens ont vu le Gouvernement
Parisien boucler leur quartier dès le 23 Mars 1962, le quadriller,
leur imposer un couvre-feu toute la journée (une heure de libre
pour faire ses courses), les pilonner avec des T6 de l'Armée
Française, (théoriquement venue en Algérie pour
nous défendre), et enfin voir les autos mitrailleuses tirer
sur les fenêtres et les balcons. Le 26 Mars, rue d'Isly, en
fut la terrible conclusion.
JP Ferrer pour le Cercle Algérianiste