L'Ennemi intime
L "ennemi intime de
Florent Emilio Siri fait suite, depuis le 3 octobre, au documentaire
assez orienté de Patrick Rotman, ayant le même titre,
et dont le réalisateur se défend de toute «
démarche militante ». Venant après les
porteurs de valises et la guerre sans nom, cette affirmation
nous semble poser problème ayant franchi la ligne rouge du
dénigrement dans ses documentaires, il paraît difficile
qu'il revienne en arrière. Les brûlures de l'histoire,
c'est du journalisme, c'est la repentance en images.
L'action est centrée sur
la confrontation d'un jeune lieutenant (engagé ?) et de son
sous-officier adjoint, stéréotype de l'ancien d'Indochine.
Ils conduisent au combat une section d'infanterie franco-musulmane,
en juillet 1959, dans les montagnes de Kabylie. Là aussi,
les atrocités envers la population sont partagées
entre les deux camps, les habitants d'une mechta sont horriblement
massacrés par les « moudjahidines », mais à mesure
qu'on progresse dans l'action, ce sont les atrocités françaises
qui prédominent tortures, exécutions sommaires,
destruction d'un village, et semble-t-il, assassinat de ses habitants.
Il ne manque que les viols.
Les actions de combat, filmées
avec un réalisme qui rappelle les films américains du Vietnam, présentent
une succession de situations exceptionnelles : - l'embuscade où
l'on inflige des pertes sensibles à une unité amie - la section
isolée dans un djebel impénétrable, qui ne semble pas avoir de capitaine,
et qui se heurte à des katibas omniprésentes - le vétéran
de Monte Cassino (clin d'oeil aux Indigènes) qui assassine
dans le dos l'un de ses anciens compagnons d'armes - un commandant
vêtu de noir (un SS ?) qui donne des ordres insensés - le sergent
devenu fou, qui se fait torturer à la gégène par un soldat musulman
- les arbres abattus par le tir des fusils-mitrailleurs (on se croirait
à Verdun) - l'officier de renseignement tortionnaire, qui a subi
les supplices de la Gestapo. Tout cela est faux, quand ce n'est
pas ridicule. On comprend parfaitement le drame de conscience de
ce jeune officier placé dans des circonstances d'exception. Penser
que tous les officiers d'Algérie ont vécu le même drame n'est pas
conforme à l'histoire.
C'est donc une section atypique
qui est engagée sans soutiens, au coeur de l'opératîon
Jumelles (22 juillet 1959 au 8 avril 1960), au moment où
les katibas se sont dispersées, et où le combat est
conduit au moins au niveau de la compagnie parachutiste. Le scénario
regroupe cependant une katiba, ce qui permet d'émouvoir les
spectateurs en leur montrant les horribles dégâts causés
par le napalm 2.
Alors que l'exploitation du renseignement
relève du niveau régiment, cette section dispose d'un
poste C9 avec génératrice, luxe inouï ! Elle
torture les prisonniers PAM (pris les armes à la main), alors
que la directive Salan du 19 mars 1958 prescrit de les diriger vers
les CMI (centres militaires d'internement, approuvés par
le CICR) où ils seront rééduqués. Ignorée
également, l'action sociale conduite envers
la population par les SAS, les EMSI, les médecins de l'AMG,
les instituteurs du contingent, les moniteurs des foyers sportifs.
On notera pour finir quelques erreurs
historiques : - le FLN aurait demandé à négocier
le 1er novembre 1954 - 2 millions d'appelés auraient servi
en Algérie - 300 à 600 000 musulmans auraient été
tués.
Reconnaissons cependant que les
paysages du Maroc sont d'une sauvagerie impressionnante, et que
les acteurs sont magnifiquement dirigés, même si la
mauvaise qualité de leur diction nuit souvent à
la compréhension des dialogues.
Maurice Faivre*, le 7 octobre
2007.
1- Voir l'excellente critique de François
Meyer dans la revue Civisme et Défense et noter que
le réalisateur, récompensé
par la Légion d'Honneur, prépare un film qui
culpabilisera la France et son armée.
2- Les spectateurs ne manqueront pas
d'être choqués par la vision des hommes atrocement
brûlés, comparables à ceux d'Hiroshima. Il faut
rappeler que le napalm aété employé en Corée,
en Indochine et en Algérie. Il a été autorisé
le 6 avril 1956 par le général Lorillot, sauf sur
les habitations. Le Comité international de la Croix Rouge
n'en interdit pas formellement l'emploi contre des objectifs militaires.
En 1980, une Convention des Nations-Unies en a proscrit l'emploi
contre la population civile
* Le général
Maurice Faivre a servi en Algérie à la tête
d'une Harka et dans les renseignement. Docteur en Sciences politiques
et historien militaire il a écrit de nombreux livres sur
la guerre d'Algérie sous ses différents aspects. Le
dernier, publié aux éditions de l'Harmatan, porte
sur l'action sociale de l'armée qui pourrait être considéré
comme une réplique au livre de Rotman. Ce serait non l'ennemi
mais "l'Ami intime des indigènes"
Notons que le film en deuxième semaine tombe à la
7ème place dans le box office ; 26 000 spectateurs pour 69
salles (130 000 spectateurs)
Un bel échec.
Voir (babelouedstory.com
) pour d'autres commentaire et opinion sur le film
Cercle pour la Défense des Combattants d'AFN,
François MEYER: http://babelouedstory.com/thema_les/desinformation/8208/8208.html
L'ennemi intime...
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