Une
page de mai 1958
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Je me souviens de
ce jour du 13 mai 1958.
Le temps était radieux. Dans l’euphorie ambiante de
cette journée, de nombreux algérois, souvent avec
leurs enfants, se pressaient dans les rues de la capitale algéroise et au pied
du Monument aux Morts, au Plateau des Glières. La population était appelée à un
jour de grève par le Comité « Vigilance » groupant les partis
politiques et des mouvements militant pour l’Algérie française, et pour assister
à une cérémonie du souvenir en mémoire des trois soldats français exécutés par
le FLN, en Tunisie : le Sergent J. Richaume du
23 ème RA ; le Cavalier Feuillebois du 18 ème Dragon et le soldat Decourtex du 23 ème RA.
La foule était de
plus en plus nombreuse. Entre 50 000 et 100 000 personnes affirmera
Alain de Sérigny dans l’Echo d’Alger.
Après la cérémonie
et le dépôt de gerbes, ce fut la montée des escaliers du Forum vers le
Gouvernement Général, d’une population aspirant à la paix, la fin de cette
guerre et du terrorisme.
Les grilles du
grand bâtiment dominant Alger étaient clôturées et résistaient aux assauts de
la population... C’est à ce moment là qu’un jeune homme, Jacky P... ─ un de mes amis du Cercle algérianiste de Nice ─ sortit de la cohue, se précipita vers un des GMC du 3 ème R.P.C., mit le moteur en marche sans aucune opposition
des parachutes et fonça sur une des grilles du G.G. qu’il défonça. Des
manifestants le suivirent et montèrent dans les étages du bâtiment... L’Algérie
française allait-elle véritablement exister depuis les fenêtres du G.G. ? Malgré
la fumée de quelques bombes lacrymogènes lancées par les CRS, les chants de la
Marseillaise et des Africains accompagnaient les clameurs d’un peuple aspirant
à un temps nouveau. Il y avait sur cette place du Forum des français, Pieds-noirs
et Musulmans, tous unis pour la paix.
L’histoire qui se
déroula par la suite, nous la connaissons...
Les hommes qui furent les héros de ces événements,
sont dans nos mémoires. Il y eut bien entendu Pierre Lagaillarde qui s’écria
face à la foule : « Irez-vous jusqu’au bout pour garder l’Algérie
française ? ». Il était accompagné de quelques autres vrais patriotes
de notre Algérie si française...
Il y eut nos
généraux partisans d’une plus grande France : Raoul Salan, Edmond Jouhaud,
Jacques Massu, puis André Zeller et Maurice Challe qui prendra le commandement
de cette résistance à l’abandon de l’Algérie.
Ces deux derniers généraux seront condamnés par un
tribunal d’exception gaulliste, après le putsch de 1961, à 15 ans de réclusion
pour leur soutien et leur participation à cette révolution de l’espoir. Ils ne
seront amnistiés qu’en 1968, tandis que d’autres soldats seront fusillés :
Jean Bastien Thiry ; Roger Degueldre ; Albert Dovecar et Claude Piegts.
En vérité, en mai
1958 nous n’avons pas « compris » que De Gaulle, depuis le balcon du
G.G. nous conduirait en 1962 à l’abandon de notre sol dont l’histoire est
inscrite dans nos cimetières, là-bas, depuis 1830.
Pourquoi alors
rappeler ce temps de mai qui remonte maintenant à quelques soixante ans ? Parce
qu’un de mes amis, Yves Rolando, m’a fait parvenir cette magnifique photo prise
par son père Robert, reporter photographe, et parue dans la « Dépêche
d’Algérie » au moment des événements de 1958 et que j’ai souhaité partager
avec vous.
Cette photo que je
conserve précieusement montre trois héros de ce temps qui ne s’oublie pas :
Raoul Salan, Edmond Jouhaud et Jacques Soustelle.
Avec nous, ils
avaient cru à une « Paix française » sur ces départements appartenant
à la Nation.
Avec nous ils subirent ce vent contraire qui
détruisit nos racines pieds-noirs et nos espoirs, transformés en juillet 1962
par le mensonge et l’assassinat, en Exode.
Ils méritent ces héros que nous nous souvenions
d’eux.
Robert Charles PUIG / 13 mai 2019
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Mis en page le 15/05/2019 par RP. |