Ce
mois-ci, une association d'Anciens combattants d'Algérie,
s'étant intronisée comme la seule représentative,
va célébrer, comme chaque année, conjointement
avec ses anciens adversaires, la date du 19 mars. Pour les uns
elle symbolise la fin des combats. Pour les autres la victoire
contre une armée d'occupation. Pour nous ce sera le triste
anniversaire d'un abandon. Nous l'avons déjà exprimé,
il n'est pas dans les habitudes d'un pays de célébrer
une défaite. Car ce fut une déroute diplomatique
et la confiscation d'une victoire sur le terrain à une
armée meurtrie qui voyait ses soldats " morts pour rien
". Une autre date aurait été préférable.
Il fut donc, pour faire taire les opposants, imposé sans
concertation, la date du 05 décembre, qui du fait même
des atermoiements et volte face des Ministres des anciens combattants
qui se succèdent, conduit à une mascarade digne
d'une pièce de théātre de boulevard. Aucun des responsables
en charge ne peut se résoudre à faire appliquer
la loi et l'on assiste à une cacophonie où chacun
reste libre de faire comme bon lui semble.
Il existait, le 16 octobre une cérémonie qui pouvait
faire consensus. Le 16 octobre 1974, le corps d'un soldat inconnu
d'Algérie était rapatrié en France et enterré
à la nécropole nationale de Notre-Dame-de-Lorette.
Depuis cette date, l'ensemble des anciens combattants d'Afrique
du Nord, sauf deux associations, rendaient hommage à la
mémoire des morts civils et militaires en Algérie,
au Maroc et en Tunisie.
Il
a donc été argué que cette date ne correspondait
à rien ! Dès lors, on peut se demander à
quoi pouvait bien correspondre cette date du 05 décembre
? Si vraiment elle était destinée à départager
les tenants des deux opinions contradictoires, il est singulier
que tel M Marleix, il soit donné toute latitude
de célébrer l'une ou l'autre.
Le 19 mars pose problème parce qu'entre mars et novembre
1962, 155 000 personnes furent assassinées et quelques
milliers disparues..
Pour un cesser le feu on ne peut pas dire que ce fut une réussite.
Pire, l'armée française à ouvert le feu sur
des manifestants français désarmés le 26
mars 1962 à Alger et s'est rendue coupable de non assistance
à personne en danger le 05 juillet à Oran en laissant
des civils aux mains de l'ALN .
Les fanatiques du 19 mars, opposent qu'un cessez le feu n'est
jamais effectif immédiatement, mais quand celui-ci voit
multiplier proportionnellement par 6 le nombre des victimes on
peut se dire que la " grande victoire de la paix en Algérie
" comme le titrait le journal l'humanité à partir
de ce jour, n'a été qu'une vaste fumisterie et une
manipulation grossière.
Quand représentant les anciens combattants, on se retrouve
pour cautionner un état de fait où près de
cinq cents soldats (camarades) ont disparu cela fait un peu désordre.
Alors
certes, on peut célébrer un cesser le feu unilatéral
qui laissait villes et campagnes aux " éléments
incontrôlés " de l'ALN et à la lutte d'influence
impitoyable de ses diverses tendances pour le pouvoir. On peut
également commémorer comme une victoire ce jour
de mars et pavoiser pour ce traité d'Evian qui fut lui
aussi, respecté à sens unique par un gouvernement
français qui avait alors comme devise quoiqu'il arrive : "
ne pas recommencer le guerre d'Algérie " (qui n'en était
pas une à l'époque). On peut encore applaudir à
s'en faire des ampoules, à un abandon indigne d'une nation
qui avait comme seule ambition de pouvoir jouer dans la cour des
grands quitte à s'enfuir piteusement. Ses ailes de géant
l'empêchait de marcher dignement.
On
peut oublier chaque année le drame des Harkis et la froide
détermination avec laquelle ils furent livrés aux
égorgeurs. On peut même justifier qu'une certaine
frange de l'armée ait préféré rentrer
à la maison plutôt que de secourir des " compatriotes
". On peut bénir ce temps où, on a largué
sans états d'āme 15 départements français.
On peut tout envisager dans ce chaos mémoriel. La France
oublie Austerlitz mais elle adore les stations thermales.
Refuser cette date c'est, diront certains, une chinoiserie de
nostalgiques incorrigibles.
Peut être. Mais il est des médailles qui tintinnabulent
dérisoirement et des drapeaux qui s'effilochent au " grand
vent de l'histoire ". Après ça, on viendra
nous donner des leçons de dignité et d'honneur et
on voudra nous éclairer à la pale lueur de lanternes
qui ressembleront plus à des vessies incontinentes qui
déversent une mémoire dégoulinante à
l'odeur infecte.
Et
tant qu'à faire puisqu'on en est à assimiler défaites
et victoires, nous pourrions célébrer également
la date du 10 mai 1871, date du traité de Francfort qui
mit fin à la guerre franco allemande. A ceux qui trouveraient
incongru cette proposition, je signale plusieurs similitudes avec
le 19 mars :
Ce fut un cesser le feu ce jour là aussi
; la France perdait des départements français ;
l'armée Prussienne épuisée, accepta avec
soulagement l'arrêt des combats ; Les français tirèrent
sur des français.
Bref
! Célébrez ! Pour mieux décérébrer.
Inaugurez les rues, les places et les squares. Offrez au quidam
désinformé le témoignage du renoncement.
Une minute de silence, puis " aux morts " et fermez le ban !