Nice-Matin samedi 11 juin 2011

Christian Estrosi confirme que la statue de de Gaulle sera inaugurée ce 18 juin

 

La statue du général De Gaulle que vous vouliez installer à Nice sur la place qui honore le nom du chef de la France libre a fait l'objet d'une polémique ces derniers mois. L'œuvre du sculpteur Cardot sera-t-elle finalement installée?
Oui, et ce sera un très beau 18 juin! Nous avons la statue depuis six mois et nous allons l'installer place De-Gaulle, comme prévu. J'ai fait comprendre à tout le monde que c'était un hommage à l'homme du 18-juin, à l'Appel du 18-juin. Ou alors, et sinon ça n'a pas de sens, il fallait me demander de débaptiser la place De-Gaulle! Mais elle porte ce nom depuis une délibération du conseil municipal prise le 1er juin 1973 et le maire était alors Jacques Médecin. Je n'ai pas souvenir que ça a ému beaucoup de gens à l'époque...  Et puis, faisons un peu d'histoire. Depuis 1909, la place s'appelait Gambetta et portait sa statue, que les Allemands ont fait fondre en 1943. Moi, je trouve qu'il y a un certain parallélisme entre le Gambetta résistant aux Prussiens pendant la Guerre de 1870 et De Gaulle qui a résisté contre le même ennemi. La statue du chef de la France libre y a donc toute sa place !

N'avez-vous pas été soumis, dans cette affaire, à la pression de deux lobbies : celui des pieds-noirs et celui des gaullistes?
Ce n'est pas un problème de lobby, je n'ai subi aucune pression... Simplement, je discute avec tout le monde. Quelques associations de rapatriés ont voulu dialoguer avec moi sur ce sujet et moi, j'ai souhaité que ce dialogue soit le plus ouvert possible. Par ailleurs, il y avait les associations de combattants qui m'avaient demandé cette statue et qui comptaient dessus... Et puis, on a reçu beaucoup de lettres en mairie. L'une d'elle, que je vous lis, déplorait « l'agitation développée autour de l'installation d'une statue du général De Gaulle dans notre ville ». Elle disait aussi : « Il nous faut admettre que, pour de nombreux Français, Charles de Gaulle est l'homme de la résistance à l'oppresseur nazi. »
Et elle ajoutait : « Dans un esprit de réconciliation, il serait bon d'ériger à Nice un monument en hommage à ces pionniers qui ont fait l'Algérie. » Il fallait permettre que chacun ait sa référence, parce que Nice est une ville de tolérance. Les rapatriés auront en 2012 un monument face à la Méditerranée, orienté vers Alger et Oran. Et il y aura la statue de De Gaulle.
Pour mémoire

 

*1 - Le Cercle algérianiste de Nice et des Alpes Maritimes attend toujours une réponse à la lettre adressée à Mr le Maire et à la demande d'entrevue qu'elle contenait.
Doit-on appeler une telle réponse "Lettre morte" ou "Dialogue"
 

      

*2 - Nous nous permettons de faire remarquer à Mr le maire, qu'il existe déjà, Square Alsace-Lorraine, érigée par une municipalité précédente, un monument en hommage aux pionniers qui ont fait l'Algérie et qui sont morts pour elle.
 

Mis en page le 13/06/2011 par RP

A Nice, une statue du général de Gaulle indigne les pieds-noirs

La statue monumentale du général de Gaulle qu'entendait ériger, à Nice, Christian Estrosi, le maire (UMP), est contestée par la communauté pied-noire. Le 17 septembre 2010, le conseil municipal a voté l'acquisition, afin de rendre hommage à des " personnalités marquantes du XXe siècle ", d'un buste du pape Jean-Paul II et d'une statue du général de Gaulle.
Haute de 3,70 m, en bronze, cette statue, d'un coût de 320 000 euros, réalisée par le sculpteur Jean Cardot, représente le chef de la France libre descendant les Champs-Elysées, le jour de la Libération de Paris. Elle devait être érigée, à l'occasion des cérémonies de commémoration de l'Appel du 18 juin, sur la place qui porte le nom du général.
" Pour l'instant, le calendrier n'a pas été fixé ", se contente d'indiquer un proche du maire de Nice. Ayant reçu l'aval de son conseil municipal, M. Estrosi ne souhaite pas polémiquer. Il est confronté à une levée de boucliers de la communauté pied-noire, forte de 40 000 personnes, dont une large part est hostile à cette édification.
" L'homme de la trahison "
En novembre 2010, un collectif d'associations de rapatriés a envoyé un courrier au maire de la cinquième ville de France pour s'élever contre le projet d'honorer " l'homme de la trahison et de l'abandon ". " Cette statue
nous offense : je suis arrivée à Nice, en 1962, avec une valise et un cercueil, celui de mon père. Il a été assassiné sous mes yeux par le FLN. J'avais 12 ans ", martèle Michèle Soler, présidente du Cercle algérianiste de Nice et des Alpes-Maritimes.
Forte du soutien d'autres associations nationales de rapatriés, Mme Soler attend un courrier officiel confirmant l'abandon définitif du projet. Si la municipalité maintenait sa décision, les associations envisagent de boycotter, en 2012, les cérémonies nationales qui doivent se tenir à Nice pour le 50e anniversaire du rapatriement des Français d'Algérie.
En 1962, 40 000 rapatriés avaient trouvé à Nice une terre d'accueil, et en Jean Médecin, puis son fils Jacques, des maires protecteurs - et antigaullistes - qui leur témoignèrent de la compassion.
" Chassée d'Oran, j'ai trouvé à 14 ans à Nice un refuge. Cette statue s'apparente à une trahison, dans la ville qui a le plus aidé les pieds-noirs ", dit Marie-Hélène Carbonel, historienne, auteur de D'une rive, l'autre. Chroniques oranaises (éd. du Compas, 2009).
Dans ce contexte émotionnel, le gaulliste Christian Estrosi devra prendre une décision pour le moins délicate.
Paul Barelli (Nice, correspondant)
© Le Monde