DECES DU PRESIDENT AUGARDE

 

Notre Président nous a quitté hier matin vers 9 heures en ayant pris le soin de se raser et de s'habiller, afin de ne déranger personne comme à son habitude.
Il nous laisse une peine infinie doublée d'un immense respect, ayant réussi sa mort comme il a réussi sa vie.

C'était un grand homme. Nous devions déjeuner ensemble aujourd'hui à midi et je suis sûû que de là où il est il doit s'inquiéter de savoir si j'ai pensé à annuler la réservation du restaurant.

Une messe sera dite à l'église Ste Géneviève des Grandes Carrières, 174 rue Championnet, Paris 18ème, métro Guy Moquet. Vendredi 21 juillet à 15 heures.

Les obsèques auront lieu lundi 24 juillet à 11 heures au cimetière municipal d'Agen, où se situe le caveau familial de la famille AUGARDE. J'aimerais que toute la communauté rapatriée puisse se joindre à nous dans cette épreuve et qu'elle exprime son soutien à Madame AUGARDE, admirable de courage et de dignité dans cette douloureuse épreuve.

Jean Félix VALLAT


 

IN MEMORIAM

En observant la foule d'amis qui nous entoure, l'émotion des visages bouleversés, j'ai l'impression que le silence devrait peut être l'emporter sur les paroles.

Pourtant et sans rompre le recueillement qui nous relie intensément à M. Jacques AUGARDE, je voudrais parler de lui, de sa marque et de sa trace qui pour moi s'expriment dans deux termes : fidélité et tolérance.

Fidélité à la France, à sa langue et à sa culture qu'il défendait en tous lieux : dans les réunions des écrivains francophones sur les 5 continents et à l'Académie des Sciences Morales et Politiques.

Fidélité à la France en danger, en s'évadant des geôles espagnoles puis en participant à la longue route des Tabors et au débarquement de l'armée d'Afrique en Provence en août 1944. Il reçut pour ses actes de bravoure la médaille des évadés, la croix de la valeur militaire pour avoir sauvé la vie d'un officier blessé en allant le récupérer sous la mitraille et la croix de guerre 39/45.

Fidélité à la France qui se reconstruisait puisqu'il façonna ses nouvelles institutions dans l'Assemblée Constituante de 1946 avant d'y participer immédiatement comme député puis ministre des affaires algériennes du gouvernement de Robert Schumann dont il devint l'ami.

Fidélité enfin au peuple français d'Algérie qu'il accompagna avec tant de courage et de discernement dans ses douleurs, son exode, sa quête encore inassouvie de reconnaissance, la recherche toujours en cours de solutions aux difficultés économiques et sociales de certains de ses membres.

Fidélité et aussi tolérance, la tolérance qui n'est pas une vertu tiède.

Pour Jacques AUGARDE le rejet de l'autre, la crispation sur des thèses en refusant par principe celles de ses interlocuteurs ou contradicteurs constituaient une hérésie. Son imprégnation chrétienne était pour beaucoup dans cette propension à la pédagogie et au dialogue. Oui, et quelques fois on le lui reprocha, c'était un homme du juste milieu. Il était au milieu de nous dans l'épreuve comme dans la fête, dans les âpres discussions avec les pouvoirs publics comme au salon des artistes rapatriés d'Antibes ou nos réunions publiques. Il était juste en reconnaissant toujours à ceux dont il pouvait être éloigné leurs qualités et leurs attraits.

Jacques AUGARDE est parti le 19 juillet tel qu'en lui même, avec simplicité et discrétion, l'éternité ne le changera pas. Je me dois de me comporter avec cette même discrétion en lui disant par le cÏur : au revoir mon cher ministre, mon maître à penser, mon ami.

JF VALLAT

 

JacquesAUGARDE était Commandeur de la Légion d'honneur et de l'ordre national du Mérite,
Grand Officier du Ouissam alaouite et du Nichan-Iftikhar,
Officier de l'Ordre de la République tunisienne et de la Couronne de Yougoslavie,
Commandeur de l'Ordre de Francesco de Miranda et de l'Ordre du Trésor sacré (Japon)