Discours
prononcé
par Lionnel LUCA
lors de l'Hommage aux Rapatriés
le 3 février à St Laurent du
Var
"Il est bon qu'une Nation soit assez forte de tradition et d'honneur
pour trouver le courage de dénoncer ses propres erreurs. Mais
elle ne doit pas oublier les raisons qu'elle peut avoir de s'estimer
elle-même. Il est dangereux en tout cas de lui demander de s'avouer
seule coupable et de la vouer à une pénitence perpétuelle."
Albert Camus
C'est pour cela que nous sommes rassemblés aujourd'hui. Pour
dire que nous sommes fiers de notre histoire, fiers de notre pays,
et que nous n'avons à nous excuser de rien.
Nous les Parlementaires, nous sommes fiers de la Loi portant reconnaissance
de la Patrie et contribution nationale en faveur des Rapatriés.
Nous assumons l'article 4 que nous avons voté à quatre
reprises.
Notre opposition à toute réécriture de cet article
a contraint les plus hautes instances de l'Etat à saisir le
Conseil Constitutionnel qui n'a pu se prononcer que sur la forme,
et non sur le fond.
Son déclassement confirme que l'article 4 n'était que
déclaratif, et qu'il n'imposait aucune histoire officielle.
Car c'est aujourd'hui qu'il y a une histoire officielle, partielle
et partiale, comme dans cet extrait de ce manuel utilisé dans
le lycée le plus proche, financé par le Conseil Régional:
" Les accords d'Evian sont signés le 18 mars 1962, et l'indépendance
est finalement proclamée le 3 juillet 1962. Des centaines de
milliers de rapatriés rentrent alors en France.
A cause de la torture assumée par de nombreux officiers comme
moyen de lutte contre le terrorisme.
A cause des Harkis abandonnés aux lendemains de la guerre.
"
Le retrait de l'alinéa 2 de l'article 4 n'accorde plus " à
l'histoire et aux sacrifices des combattants de l'armée française
issue de ces territoires la place éminente à laquelle
ils ont droit ".
C'est ni plus ni moins du négationnisme qui maintient dans
l'oubli le rôle des soldats de nos territoires pendant la 1ère
guerre mondiale, dans l'Armée d'Afrique, pendant la Campagne
d'Italie, dans le débarquement de Provence, en Indochine et
pendant la Guerre d'Algérie.
C'est bien ce que voulait le Chef d'Etat algérien en insultant
la France, sa représentation nationale et son peuple.
Voilà pourquoi nous exigeons
que la réécriture réglementaire conserve cet
hommage qui est le sens de notre présence.
Voilà pourquoi nous n'accepterons jamais un traité d'amitié
avec l'Algérie sur des bases aussi tronquées.
En tout état de cause, article 4 ou pas, cette polémique
mystificatrice aura eu le mérite de dire enfin qu'il y a bien
des aspects positifs à la présence française
outre-mer, et que deux tiers des Français le pensent aussi.
Il sera très difficile désormais aux éditeurs
de faire des manuels scolaires à sens unique, comme celui auquel
j'ai fait référence. De ce point de vue, notre combat
aura été utile.
Oui, il faudra bien dire que c'est l'intervention militaire française
qui a mis fin à l'esclavage en Afrique du Nord sous domination
ottomane.
Oui, il faudra bien dire que le plus bel hommage de la présence
française outre-mer, c'est la francophonie. 60 Etats rassemblés
autour de la France (dont certains issus de l'empire britannique)
partageant la même langue, la même histoire, la même
solidarité politique qui lui a permis à l'ONU de s'opposer
à l'intervention américaine en Irak. C'est ce qui fait
que la France est toujours une grande puissance.
Nous ne ferons pas la France du XXIème
siècle sur le renoncement, sur la repentance et sur l'humiliation.
Nous ferons la France du XXIème siècle en continuant
ensemble, quelle que soit l'origine de ses fils et de ses filles,
une histoire glorieuse dont nous sommes les héritiers, tant
il est vrai "qu'il y a un pacte multiséculaire entre la grandeur
de la France et la Liberté du monde".