Le SCEAU du DEY d'ALGER.

Quel beau cadeau, et quelle bonne idée de rappeler à Monsieur le Président Boutéflika et à tous les Algériens présents et à venir que l'Algérie, jusqu'au 5 Juillet 1830, n 'était qu'une bien pauvre province de l'Empire Turc !

Et, en outre, de rappeler, quoi que vous en pensiez, que, avant la conquête française, la fonction de Dey d'Alger était élective ! Parfaitement, elle était élective.

Mais le collège électoral était certes, un peu particulier. Les autochtones n'y avaient aucune possibilité d'en faire partie. Pas les Juifs, bien sur, car ils comptaient pour moins que rien. Pas les Musulmans autochtones, Maures, Arabes, Kabyles, Mozabites et autres. Quoi qu'ils fassent, quoi qu 'ils soient, ils n'en n'avaient pas la possibilité. Seuls en faisaient partie des hommes (pas de femmes, bien sûr, nous étions en Pays d'Islam). Et, chose curieuse, ils exerçaient tous le même métier. Pour tout dire, c'étaient les Janissaires envoyés en Algérie par la Sublime Porte pour gouverner ce pays au nom du Sultan de Constantinople.

A chaque vacance du pouvoir à Alger, les Janissaires élisaient celui qui, à leurs yeux, était le plus apte à les commander. Il faut préciser que l'usage voulait que les candidats promettent de verser en cas d'élection un certaine somme à chaque électeur. Et, en général, plus la somme était importante, et plus les chances du candidat étaient élevées. Et de fait, c'était le trésorier du Dey précédent, le Khasnadji qui était élu pour succéder à son ancien maître, tout simplement parce qu'il savait ce qu'il y avait dans le Trésor.

Une fois élu et proclamé chez les Janissaires (la caserne de ceux-ci était devenue le Cercle des Officiers d'Alger), on remettait solennellement le sceau au nouvel élu. Celui-ci devait alors informer la Sublime Porte de son élévation. Et l'usage voulait que ce message soit accompagné de cadeaux précieux. Une amie d'enfance de Joséphine de Beauharnais, jeune fille très belle fut l'un de ceux-ci à la fin du XVII ème siècle.

La population algérienne, et surtout celle d'Alger et de Blida était fermement invitée à verser une contribution extraordinaire aussi volontaire qu'obligatoire pour la plus grande gloire du nouveau Dey.

Le problème se compliquait lorsque le Trésor et les bénéfices de la course en mer n'arrivaient pas à permettre de payer les cadeaux promis. Alors les Janissaires commençaient à frapper leurs marmites avec la cuiller en bois qui était leur insigne (elle était le témoin que les Janissaires étaient nourris aux frais du Sultan). Et, si le Dey ne comprenait pas très vite ce message, il risquait d'avoir une fin rapide. Dès qu'il était mort, on lui reprenait le sceau symbole de son pouvoir, et les Janissaires se dépêchaient d'élire son successeur.

Alors, offrir à la République Algérienne ce sceau du Dey c'est bien rappeler à ce pays qu'avant 1830, il n'avait même pas de nom. Avait-il seulement une existence ?

Maurice Bel

Crée le 25/03/2003 par RP