Homélie de Mgr Molinas

Notre Maman du ciel, Notre Dame d’Afrique, Mère de Dieu et Mère des Hommes, nous réunit cette année encore en ce lieu.

Nous avons répondu à son appel car Elle nous invite une fois de plus à nous rapprocher de son Fils bien aimé, Notre Seigneur Jésus Christ. Elle nous invite à venir sur cette colline pour y déposer nos fardeaux et recevoir sa consolation. Elle est vraiment Mère, et Elle ne saurait faillir à la mission que son Divin Fils lui a confiée alors même qu’Il se trouvait sur la Croix dans l’accomplissement total du don de sa Personne pour le salut du monde.

Nous ne doutons pas que les prières que nous Lui avons adressées ne sont pas restées lettres mortes, et que, même si elles n’ont pas été exaucées de la manière que nous l’aurions désirée, le Cœur de Jésus, par l’intercession de la Vierge Marie, s’est ouvert à chacune de nos demandes pour laisser s’épancher la compassion et la miséricorde divines.

Oh, je crois savoir tout ce que vous avez pu venir lui confier de vos peines, mais aussi de vos joies, de vos espérances pour les vôtres ou pour vous-même. De vos inquiétudes face à un horizon des plus sombres où dominent le rejet de Dieu avec comme conséquences la guerre, la haine, la déshumanisation de la société, la désintégration de la famille…Et en plus, pour nous Pieds-Noirs et Harkis, la souffrance d’une plaie toujours ouverte, 54 ans après la perte de notre pays, l’Algérie. Le mensonge, la trahison, la manipulation n’ont cessé de poursuivre leur œuvre pour couvrir le crime commis par celui qui avait su si bien nous abuser et par ses complices de tous bords, dont les survivants ou les descendants idéologiques travestissent de manière éhontée cet abandon. L’Algérie c’était la France, mais pour nier cette réalité ils n’hésiteront pas à déconnecter les consciences, à laver les cerveaux et, en refaisant l’histoire, à culpabiliser toute une nation qui, depuis, ne cesse de se repentir d’une faute qu’elle n’a pas commise. Opération mortifère qui conduit à la négation de la patrie et de toutes les valeurs qui s’y rapportent. Mais, plus grave encore, pour que la mise à mort spirituelle soit complète, il s’agit aujourd’hui de couper la France, et avec elle tout l’occident, de ses racines chrétiennes, d’une culture et d’une société édifiées sur le christianisme. Comme je vous le disais l’an dernier, l’Algérie a été l’un des pions de l’échiquier sur lequel se jouait la stratégie de la destruction de l’occident chrétien. Face aux forces des ténèbres qui se déchaînèrent alors, notre petit peuple lutta autant qu’il le put ; de véritables héros se révélèrent et n’hésitèrent pas à donner leur vie dans un combat inégal ; nous pouvons en être fiers ; d’autres, nombreux, innocents et sans défense furent fauchés, victimes d’un holocauste dont le but était de rendre impossible toute survie, quelle qu’elle soit, de ce qui avait été construit durant ces 130 années de labeur, de courage, de persévérance et de découvertes mutuelles entre les différentes composantes de la population de l’Algérie française. Dans une allocution à l’occasion du cinquantième anniversaire de l’église de Notre d’Afrique à Carnoux en Provence, Mgr Jean-Marc Aveline, évêque auxiliaire de Marseille et lui-même Pied-Noir né à Sidi bel Abbès en 1958, évoque « le mélange culturel qui nous a façonnés chrétiens, juifs et musulmans, là-bas, sur l’autre rive, jusqu’à ce qu’un vent sournois venu d’ailleurs, éveillent les méfiances, brisent les amitiés et distille la haine ». Oui, il fallait creuser un abîme entre les communautés et le terrorisme y est parvenu. Quel constat 54 ans après : une Algérie au bord du gouffre, et une France qui a perdu son honneur et son identité. Puis-je citer encore Mgr Aveline lorsqu’il dit que, retournant là-bas ces dernières années, « il a pensé avec tristesse que ce n’est sans doute pas lorsqu’elle était française que l’Algérie avait été la plus malheureuse ». Même si, bien sûr, les choses devaient continuer de changer. Mais il y avait certainement d’autres voies ! Et j’ose ajouter d’autres voies que l’abandon lâche et criminel du pays entre les mains des égorgeurs.

Hélas, nous ne referons pas l’histoire.  Cependant il nous faut vivre le présent et lutter pour l’avenir, celui de nos enfants, de nos familles et de notre patrie. Mais nous savons aussi que l’avenir est entre les mains de Dieu. Bien sûr, une telle pensée ne doit pas nous plonger dans le fatalisme d’un Mektoub qui nous réduirait à une attente passive des événements. Mais bien au contraire à une mobilisation générale pour agir avec Dieu et par sa grâce à l’édification d’un monde nouveau. Quelles sont les armes pour mener ce combat : en tout premier lieu et d’une manière urgentissime, la prière. En particulier la prière à Marie. C’est Elle, Notre Dame d’Afrique, qui nous conduira dans la défense de notre foi et de notre patrie. Et justement, pour chacun de nous, s’impose la redécouverte de cette foi chrétienne et son approfondissement. Vivez véritablement votre foi. Je vous lance un mot d’ordre : « Occupez vos églises ; ne les laissez pas vides. » Si vous les remplissez, elles seront autant de bastions solides qui empêcheront les ténèbres d’envahir notre monde. C’est là que vous puiserez la force et le courage nécessaires pour faire face à l’adversaire et pour ne pas craindre de vous affirmer chrétiens.

Que Notre Dame d’Afrique et tous les saints d’Afrique du Nord… nous aident à être fidèles à Dieu et à son Eglise. Amen.