Les
accords déviants
« Le monde au sein duquel
nous nous sommes formés à la vie et à la
pensée est un monde foudroyé » dit Paul
Valéry dans son discours d'intronisation à l'Académie
Française...
Un monde foudroyé, calciné...
Il est instructif de lire avec attention
l'exposé de René Mayer concernant les soi-disant
accords d'Evian. Ces « accords » sans aucune
validité juridiques puisque signés, comme je l'ai
publié dans le tome III de l'Agonie d'Oran par un seul
envoyé du G.P.R.A. et récusés dès
leur proclamation par ce même G.P.R.A. dont les membres
qui n'avaient d'ailleurs aucune légitimité furent
renvoyés à leurs chères études par
le véritable interlocuteur caché de De Gaulle, le
FLN.
Voici ce
qu'écrit René Mayer : « Si,
bien qu'ils aient été violés dès la
première heure, aucun gouvernement français n'a
jamais tenté un quelconque recours devant la Cour internationale
de justice de La Haye, c'est que l'existence des « accords »
d'Evian en tant que contrat ayant une valeur juridique internationale
est des plus douteuse... »
Les raisons invoquées par l'auteur
sont tellement lumineuses « qu'une seule serait suffisante
pour assurer leur nullité. »
Je ne peux, ici, que renvoyer le lecteur
au texte de René Mayer extrait de son ouvrage : « Algérie :
mémoire déracinée » (Ed. L'Harmattan
1999). Il ajoute : « Comment dès lors soutenir
valablement que les gouvernements qui se sont succédés
à Alger étaient tenus par des « accords »
conclus par un ectoplasme juridique ». Puisqu'en effet
« la nature juridique exacte (G.P.R.A. ou F.L.N.) de
la personne morale qu'elle (la France) s'était choisie
comme partenaire à la négociation, reste à
définir. »
C'est donc à juste titre, comme
nous l'avons toujours écrit, que les opposants à
ces « accords » se sont rebellés
contre leur application unilatérale par la force publique
française : C.R.S. et Gardes Mobiles alliés
à ceux qui demeuraient des hors-la-loi, les terroristes
F.L.N. augmentés des « marsiens »
et des A.T.O.
Cela faisait beaucoup de meurtriers
en puissance des malheureux Français d'Algérie et
le courage des O.A.S., et de la population qui les aidait, les
hébergeait et portait leurs documents frisait l'inconscience
ou plutôt la folie du désespoir.
René Mayer souligne que la
presse de l'époque ne parlait pas d'accords mais de « déclaration
d'intention », lesquelles intentions ne sont en effet,
tout au long des pages de ces « non accords »
que des vĎux pieux destinés à leurrer le bon peuple
de métropole, une manipulation abominable dont bien peu
de juristes se sont alors avisés et que seule la statue
du commandeur a pu imposer par machiavélisme.
Il était facile d'influencer
des parents désireux de voir revenir leurs enfants et sans
doute pour beaucoup, imprégnés de ces thèses
communistes alors en vogue...
En effet, depuis la fin de la 2ˇ guerre
mondiale, les « intellectuels » prônaient
la vie idyllique de l'U.R.S.S. ; les propos imbéciles
de Jean-Paul Sartre étaient devenus paroles d'évangile
et quiconque n'était pas converti aux merveilles soviétiques
était un « salaud » qu'il convenait
de supprimer, à commencer par ces colons sueurs de burnous !
Il est intéressant d'étudier
les changements d'opinion entre le commencement de la guerre d'Algérie
et sa fin ; comment les Français cocardiers, courageux,
sont devenus, en s'imprégnant des écrits des journaux,
de la radio, ce que De gaulle appelait avec son habituel mépris
« des veaux ».
Certes, les Français étaient
las des années de guerre et de l'occupation ; beaucoup
commençaient à avoir honte d'être français
puisqu'on leur affirmait que la France était méprisable ;
ils ne percevaient plus, comme leurs aïeux, la colonisation
comme une mission civilisatrice mais comme un boulet qui leur
coûtait cher.
L'énorme bêtise de faire
venir en Algérie un contingent marxisé ou simplement
lâche et intoxiqué ne pouvait qu'aggraver le malentendu
bien que la plupart des conscrits et des rappelés aient
fait leur devoir de soldat avec courage. Mais comment se battre
pour ce que l'on ne comprend pas ? Dont on n'imagine pas
l'enjeu ? Qu'on vous a appris à mépriser ?
Aujourd'hui, le problème qui
a amené notre exil s'est déplacé en France
et en Europe : c'est l'ignorance et le mépris de la
civilisation européenne. Or, ceci est le résultat
de cette mutation intellectuelle produite dans les années
50 et concrétisées par ces « déclarations
d'intention » promulguées le 19 mars 1962. Tout
se tient !
C'est pour cela que j'estime que cette
date n'est pas seulement la lettre de cachet qui nous a jeté
hors de chez nous mais la marque indélébile d'une
abdication morale de la France, ce qui justifie le titre de mon
billet : Les accords déviants.
Un monde foudroyé !
Geneviève de Ternant
16 mars 2010
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