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Jean-Jacques JORDI
  Un Silence d'Etat (Les disparius civils européens de la guerre d'Algérie). (Editions SOTECA)

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UN SILENCE D'ETAT Les disparus civils européens de la guerre d'Algérie

Ecrire scientifiquement sur les disparus civils européens pendant la guerre d'Algérie c'est lever le dernier tabou de ce conflit. C'est d
ire surtout ce que nous ne voulons pas entendre depuis près d'un demi-siècle. Il y a eu beaucoup plus d'Européens enlevés et dont nous n'avons aujourd'hui aucune trace après les Accords d'Enviant et après l'indépendance de l'Algérie qu'en pleine guerre. C'est dire aussi que le FLN (Front de Libération Nationale) et l'ALN (Armée de Libération Nationale) ont été les principaux acteurs de ces disparitions et qu'à aucun moment leurs dirigeants n'ont désavoue ces pratiques. Le but de faire partir les Français d'Algérie fut finalement atteint par la terreur instituée par le FLN. C'est dire enfin que le gouvernement français était parfaitement au courant des exactions perpétrées contre ses ressortissants sans intervenir autrement que par de vaines protestations Par cette étude le manichéisme issu de la guerre d'Algérie entre les "bons" d'un côté et les "mauvais" de l'autre n'a plus cours. L'analyse de cet ouvrage permet de redonner une histoire à des personnes, à des familles qui en étaient privées. Approcher cette histoire était toute l'ambition de cette recherche novatrice.

Jean-Jacques Jordi est docteur en Histoire et spécialiste de l'histoire des migrations en Méditerranée aux XIXe et XXe siècles, de l'Algérie, des colonisations et des décolonisations et de Marseille. Il a publié et dirigé plusieurs ouvrages et articles de référence sur les migrations méditerranéennes passant des migrations espagnoles aux migrations venant d'Algérie publiant aussi sur les Harkis et les Pieds-Noirs. Il a écrit de nombreux articles et a participé à de nombreux colloques et conférences tant en France qu'à l'étranger. Il a été conseiller historique de plusieurs documentaires (France2, France3, Arte, M6)

*COMMENTAIRES*

DU NOUVEAU SUR LES EUROPEENS DISPARUS A LA FIN DE LA GUERRE D'ALGERIE.
par Jean MONNERET.

Durant un demi-siècle,le problème des civils européens enlevés par le FLN , et jamais retrouvés pour un grand nombre, fut singulièrement occulté. Officiellement, on s'en tint à un chiffre donné en 1964 au Sénat: 3018. La répartition des victimes en personnes enlevées, libérées, présumées décédées et cas incertains ne fut guère remise en cause. A partir de 1965, le silence des médias à ce sujet se fit assourdissant. Les Français disparus furent oubliés tandis que la France prit l'étrange habitude de réserver ses hommages aux victimes de l'autre camp, les pro-indépendantistes. (Particulièrement à Paris sous l'égide de la Mairie socialiste.)
Dans le milieu des Français d'Algérie, on chercha à lutter contre l'oubli. Hélas, des chiffres hyperboliques furent brandis au mépris de toute rigueur historique. La cause des victimes du FLN risqua d'en être dépréciée, d'autant que des thèses complotardes fumeuses se répandaient aussi.
Désormais,la communauté des Historiens comme les Pieds Noirs et les familles concernées disposent d'une étude de qualité, menée selon la méthode historique. Jean-Jacques Jordi a fait des recherches poussées en de nombreux fonds d'archives. Citons: le Service Historique de la Défense, le Centre des Archives Diplomatiques, les Archives Nationales d'Outre-Mer, le Centre des Archives Contemporaines, le Centre Historique des Archives Nationales, celles de la Croix Rouge, du Service Central des Rapatriés etc...
L'auteur a ainsi apporté une contribution neuve au problème des disparus européens. Il a attaqué de front l'obstacle des 500 dossiers demeurés incertains qui gênait l'obtention de chiffres crédibles.

Sur ce point,en 2004, nous avions nous même,ainsi que le général Faivre attiré, l'attention de la Mission aux Rapatriés sur la nécessité d'une étude exhaustive . Il fallut attendre quatre ans pour qu'elle se dessinât .
En accédant aux dossiers du Service Central des Rapatriés, Jordi a pu savoir qui parmi les incertains était réellement disparu ou entré en France métropolitaine. On y voit actuellement plus clair.
Qu'il s'agisse du massacre du 5 juillet 62 à Oran (où l'auteur confirme la responsabilité et les mensonges du général Katz, comme la criminelle ineptie des directives données à l'Armée française), qu'il s'agisse des exactions de l'été 62 dues à la wilaya 4 (où le FLN préférait enlever des familles entières pour limiter les plaintes), Jordi a montré une solide rigueur.
Il éclaire la pratique du nettoyage ethnique par les indépendantistes. Or, il le fait, documents à l'appui, en prenant ses distances avec quelques légendes aussi tenaces qu'absurdes. Son livre est peu réfutable. Il sera plus difficile désormais aux thuriféraires du FLN et aux journalistes sous influence de nier des faits qui les dérangent.
On peut regretter que Jordi paraisse sous-estimer les divisions du FLN et les surenchères xénophobes qu'elles alimentèrent. Félicitons le toutefois d'avoir laissé de côté quelques récits controuvés et extravagants.
Cet ouvrage, cette étude méticuleuse manquaient. Il serait regrettable qu'ici et là, certains négligent l 'atout que, dans sa percutante sobriété, il constitue pour les familles touchées et pour l'Histoire.


La reconnaissance des disparitions d'Européens lors de la guerre d'Algérie est restée en France un secret d'Etat pendant plus de 40 ans ; elle fait toujours l'objet d'un déni de la part des Algériens. Une première recherche scientifique a été engagée en 2004 par une équipe constituée par la Mission interministérielle aux rapatriés (MIR), en coopération avec le Haut Conseil des Rapatriés et la Direction des archives diplomatiques. Le rapport de cette équipe, en novembre 2006, concluait à la disparition d'environ 2000 Français d'Algérie dont 320 avant le cessez-le-feu. Mais ce total comprenait 535 personnes au sort incertain.
L'auteur est donc parti de ce résultat et a conduit une recherche approfondie dans des fonds d'archives, autres que diplomatiques, qui n'avaient pas été consultés : les Centres des archives nationales, contemporaines, militaires, d'outremer, de la Croix-Rouge, et surtout du Service central des Rapatriés. La consultation de 12.000 dossiers lui a permis de réduire les cas incertains à 170, et de publier les listes - des présumés décédés (1.583 dont 145 Musulmans) - des cas incertains - des personnes dont le corps a été retrouvé (123). En outre 349 faux disparus sont rentrés en France et 84 militaires ont été inscrits au mémorial du quai Branly. La répartition des disparus est précisée par année, mois de 1962 et par département : 40% ont eu lieu à Alger et 35% à Oran ( 679 Oranais du 26 juin au 10 juillet 1962). Des charniers sont découverts près d'Alger, et des lieux de détention connus ; des témoignages précis confirment la réalité des enlèvements de familles entières. Il apparaît enfin que 900 noms ont été gravés par erreur sur le mur des disparus édifié à Perpignan.
Ce travail considérable met en évidence et confirme des faits historiques qui sont contestés par des historiens inspirés par une vision manichéenne du bon et du mauvais combat. En voici quelques-uns :
- le terrorisme du FLN-ALN a été beaucoup plus meurtrier que celui de l'OAS ; dès 1955, il visait à l'extermination de tous les Français d'Algérie, préconisait la mutilation des corps et éliminait en masse les Français-Musulmans loyaux,
- les disparitions forcées sont considérées par l'ONU comme des crimes contre l'humanité,
or les auteurs d'enlèvement n'ont jamais été condamnés (cas de Attou à Oran),
- réagissant à la violence des nationalistes, les Français d'Algérie se sont repliés dans les villes, ont riposté aux attentats par des ratonnades et ont soutenu l'OAS; le commandant Azzedine confirme que leur exode massif est la conséquence des enlèvements.
- les accords d'Evian n'ont pas été respectés par le FLN, dont les dirigeants se déchirent pendant tout l'été 1962, ce qui a facilité les exactions et les sévices,
- les directives de non-intervention militaire du Premier ministre confirment les décisions gaullistes au Comité des Affaires algériennes (20 décembre 1961, 27 février et 23 juin 1962) ; le général Katz prétend ne pas avoir de consignes, alors que les directives du général Fourquet (19 et 27 juin) sont très claires ; le 5 juillet à Oran, les interventions militaires ont été plus nombreuses qu'on le dit,
- la majorité des enlevés ont été torturés, et certains vidés de leurs sang (confirmation de Gregor Mathias).
La recherche historique progresse ; il faut faire confiance aux historiens qui tels que Jordi, sont attachés à la réalité des faits.

Maurice Faivre, le 31 octobre 2011.


Un silence d’Etat
De Jean-Jacques JORDI
Editions SOTECA (25e)

  « Les disparus civils européens de la guerre d’Algérie », sujet tabou depuis 50 ans !

L’auteur, docteur en histoire et spécialiste de l’histoire des migrations en Méditerranée au XIX° et XX° siècles, de l’Algérie, des colonisations et décolonisations et de Marseille, s’est saisi à bras le corps de cette histoire mise sous le boisseau.

On s’aperçoit, en lisant cette étude remarquable, que bien du monde a su, savait et sait, à l’exception des familles concernées, soigneusement tenues dans l’ignorance, à l’exception aussi des nombreuses personnes de bonne volonté sans moyen, sans argent, sans influence, qui n’ont eu pour seul mérite que d’essayer d’apporter une petite lueur dans cette obscurité voulue.

Ce fut le cas du Capitaine Leclerc, du Commandant Bautista et de moi-même. Le résultat, brouillon, c’est vrai, fut tout de même que le sort de ces pauvres gens et le chagrin des familles remontaient à la surface du marécage, empêchaient qu’on les oubliât...

D’autres personnes, avec un dévouement qui ne se laissait pas rebuter par les interdictions, les clapets des archives qui s’ouvraient et se refermaient, les rebuffades parfois, s’attelèrent à ce travail : Colette Ducos-Ader, Jean Monneret et Le Général Maurice Faivre en particulier.

Jean-Jacques JORDI, en scientifique, repris tout ce qui avait été dit, écrit, publié et surtout obtint l’ouverture exceptionnelle d’archives secrètes.

Il y découvrit un échantillonnage sordide de lâchetés des officiels, des démissions morales des militaires et des politiques et je pense qu’il eut souvent un haut le cœur à extraire de cette tourbe la vérité des faits que nous, simples témoins et néanmoins acteurs forcés du drame nous égosillions à clamer. Les preuves écrites étaient là.

Il fallait encore, toujours scientifiquement, les exhumer, les trier, les ranger en ordre de marche et les publier de façon claire. C’est fait et bien fait.

Il faut lire et faire lire cet ouvrage courageux. Il faut que nos enfants découvrent l’étendue des crimes commis sur des civils innocents et la duplicité autant que l’aveuglement criminel du gouvernement français.

Lisez, réfléchissez et jugez !

                                                        Geneviève de Ternant

                                                         27 novembre 2011


DU NOUVEAU SUR LES EUROPEENS DISPARUS A LA FIN DE LA GUERRE D'ALGERIE.*1   

par Jean MONNERET.

  Durant un demi-siècle,le problème des civils européens enlevés par le FLN, et jamais retrouvés pour un grand nombre,fut singulièrement occulté. Officiellement, on s'en tint à un chiffre donné en 1964 au Sénat : 3018. La répartition des victimes en personnes enlevées, libérées, présumées décédées et cas incertains ne fut guère remise en cause. A partir de 1965,le silence des médias à ce sujet se fit assourdissant. Les Français disparus furent oubliés tandis que la France prit l'étrange habitude de réserver ses hommages aux victimes de l'autre camp, les pro-indépendantistes. (Particulièrement à Paris sous l'égide de la Mairie socialiste.) 

  Dans le milieu des Français d'Algérie, on chercha à lutter contre l'oubli. Hélas, des chiffres hyperboliques furent brandis au mépris de toute rigueur historique.*2. La cause des victimes du FLN risqua d'en être dépréciée, d'autant que des thèses complotardes fumeuses se répandaient aussi.

Désormais,la communauté des Historiens comme les Pieds Noirs et les familles concernées disposent d'une étude de qualité, menée selon la méthode historique. Jean-Jacques Jordi a fait  des recherches poussées en de nombreux fonds d'archives. Citons: le Service Historique de la Défense,le Centre des Archives Diplomatiques,les Archives Nationales d'Outre-Mer, le Centre des Archives Contemporaines, le Centre Historique des Archives Nationales, celles de la Croix Rouge, du Service Central des Rapatriés etc;...

L'auteur a ainsi  apporté une contribution neuve au problème des disparus européens. Il a attaqué de front l'obstacle des 500 dossiers demeurés incertains qui gênait l'obtention de chiffres crédibles.

Sur ce point,en 2004, nous avions nous même,ainsi que le général Faivre attiré,  l'attention de la Mission aux Rapatriés sur la nécessité d'une étude exhaustive. Il fallut attendre quatre ans pour qu'elle  se dessinât. 

En accédant aux dossiers du Service Central des Rapatriés, Jordi a pu savoir qui parmi les incertains  était réellement disparu ou entré en France métropolitaine. On y voit actuellement plus clair.

Qu'il s'agisse du massacre du 5 juillet 62 à Oran (où l'auteur confirme la responsabilité et les mensonges du général Katz, comme la criminelle ineptie des directives données à l'Armée française), qu'il s'agisse des exactions de l'été 62 dues à la wilaya 4 (où le FLN préférait enlever des familles entières pour limiter les plaintes), Jordi a montré une solide rigueur.

  Il éclaire la pratique du nettoyage ethnique  par les indépendantistes. Or, il le fait, documents à l'appui, en prenant ses distances avec quelques légendes aussi tenaces qu'absurdes. Son livre est peu réfutable. Il sera plus difficile désormais aux thuriféraires du FLN et aux journalistes sous influence de nier des faits qui les dérangent.

  On peut regretter que Jordi paraisse sous-estimer les divisions du FLN et les surenchères xénophobes qu'elles alimentèrent. Félicitons le toutefois d'avoir laissé de côté quelques récits controuvés et extravagants.*3

  Cet ouvrage, cette étude méticuleuse manquaient. Il serait regrettable qu'ici et là,certains négligent l 'atout que, dans sa percutante sobriété, il constitue pour les familles touchées et pour l' Histoire.

1*. Jean-Jacques Jordi. Un silence d'état. Ed. SOTECA.

Les enlèvements d'Européens ont décuplé aprés le "cessez-le-feu "  du 19/3 / 1962. L'auteur dénombre 1583 disparus présumes décédés, 123 enlevés dont on a retrouvé les corps et 171 cas incertains résiduels. Selon nous,il eût fallu comptabiliser les personnes libérées ou retrouvées.

2*Il arriva qu'un scribe du Ministère des Rapatriés répondit par erreur : 25.000 à une question sur le chiffre des disparus européens. Il confondait avec celui des militaires français tués au combat.Ceci occasionna ultérieurement quelques bévues.

3*. En juillet 1962, depuis Alger,Max Clos du Figaro, dénonça courageusement les enlèvements massifs d'Européens.Il ajoutait :" Sur les chiffres, on ne sait rien de sûr.Tout dans ce pays est déformé et amplifié dans des proportions fantastiques. " Voila qui a changé désormais.


Commentaire de Guy Perville