Colloque sur l'Histoire franco-algérienne
LYON 20, 21 et 22 juin 2006
Mesdames, Messieurs,
Le Comité VERITAS, qui contrairement aux affirmations du quotidien
« Le progrès de Lyon » a assisté, en tant qu'association nationale
de rapatriés, au colloque visé ci-dessus, vous livre ici ses premières
impression, tout en affirmant son apolitisme le plus absolu, n'ayant
pour mission que de combattre et rectifier les falsifications
sur l'Histoire de la colonisation française en Algérie, tenait
à vous livrer ici ses premières impressions.
Sous l'égide prestigieuse de l'Ecole Normale Supérieure (E.N.S.),
cette délibération était annoncée comme un examen «citoyen et
critique » des 132 ans de présence française sur cette terre qui
ne s'appelait pas encore l'Algérie.
Un tel colloque semblait s'annoncer sous les meilleurs auspices.
En effet, deux mots clés, deux adjectifs, permettaient l'espoir
d'une relation objective du drame : une Histoire critique impliquant
UNE ANALYSE DE TOUTES LES SOURCES D'INFORMATION, SANS EXCLUSIVE,
suivi d'un effort de synthèse sans a priori idéologique.
« Une Histoire citoyenne » signifiait LE DROIT pour tous ceux
qui furent acteurs, témoins, responsables ou victimes, d'être
entendus, sans distinction et sans parti pris pour personne. Une
Histoire « CITOYENNE » devrait s'entendre comme une participation
des citoyens à sa rédaction à travers les expériences notées par
les témoins sur le terrain, et non être confiée seulement aux
« spécialistes » en chambre, dans de petits cénacles fermés.
Cette participation « citoyenne » annoncée n'était-elle pas le
meilleur garant d'une indépendance vis-à-vis des lobbys idéologiques
ou politiques qui ont, si fâcheusement, influencé la rédaction
de l'Histoire franco-algérienne jusqu'ici ?
Quant à l'antagonisme souvent rencontré entre Histoire et mémoire,
entre le pacte de vérité exigé de la première et le voeu de fidélité
inséparable de la seconde, il aurait pu se résoudre dans un tel
colloque si toutes les parties en cause avaient eu droit à une
reconnaissance et à l'admission de pouvoir exprimer la réalité
des faits vécus et des épreuves subies.
Ainsi, après un demi-siècle, le souvenir de tant d'épreuves,
évoqué en commun entre hommes de bonne volonté, pouvait amorcer
cet apaisement si ardemment souhaité et si indispensable, tant
pour rétablir la cohésion nationale de la société française, que
pour asseoir de nouvelles bases apaisées pour les relations franco-algérienne
à venir.
Hélas, la suite du texte de présentation du site de ce colloque
extrêmement restrictif quant aux historiens et aux témoins appelés
à y participer annulait tout espoir : « Ce colloque souhaite donner
la parole à ceux des historiens dont ses promoteurs pensent qu'ils
servent le mieux l'Histoire, loin des chroniques officielles et
des leaders de mémoire, loin des « historiens » idéologues et
des mémorialistes de combat. ».
Le caractère fondamental du choix des historiens retenus reposait,
avant tout, sur l'élimination arbitraire de...tous les autres
réunis dans un fourre-tout d'opprobre et d'incapacité ! C'est
bien l'esprit même de ce colloque qui tournait résolument le dos
à tout projet « d'Histoire citoyenne » réécrite en commun que
résumait « Le progrès de Lyon », grand quotidien de la région
Rhône-Alpes, dans son édition du 19 juin, la veille de l'ouverture.
Devant la montée des protestations de nombreuses associations
de rapatriés contre cette inimaginable « sélection » brutalement
éliminatoire, le journaliste Michel Prévost écrivait : « POUR
LES ORGANISATEURS DE CE COLLOQUE, LES VOIX CRITIQUES NE REPRESENTENT
PAS, NUMERIQUEMENT ET INTELLECTUELLEMENT, UNE OPPOSITION CREDIBLE
».
Subtil euphémisme pour nous renvoyer dans nos pénates, comme
une minorité de débiles dégénérés !
Nous avions beau être prévenus, en assistant à quelques unes
des communications annoncées, la réalité fut pire que ce que nous
pouvions appréhender. Rarement sectarisme, désinformation, omission
systématique purent se déployer aussi largement dans le prisme
déformant d'un anticolonialisme aveugle, irraisonné, militant.
Aucune méthode ne peut être davantage opposée à l'impartialité
que réclame l'Histoire, près d'un demi-siècle plus tard !
Ainsi, par exemple, la majorité des Autorités politiques, morales,
philosophiques, religieuses de la France au XlXème et au début
du XXème siècle, favorable à l'oeuvre coloniale française en Afrique
fut passée au crible d'une sorte de condamnation rétroactive.
La France universitaire, du moins celle qui était représentée
à Lyon en ce mois de juin 2006, reniait allégrement plus d'un
siècle de notre Histoire et quatre ou cinq générations de nos
ancêtres des deux bords de la Méditerranée !
Aucune autre nation européenne, ancienne puissance coloniale
à la même époque que celle de la France, ne s'est jamais livrée
à un tel jeu de massacre de ses propres concitoyens des deux derniers
siècles. Triste exception française que cette rupture de solidarité
avec nos ancêtres, solidarité qui, seule, pérennise cette communauté
de destin qui est à la base de tout sentiment patriotique... Quel
trouble jeté dans les jeunes générations déjà « en crise identitaire
» !
Il nous a été particulièrement pénible de retrouver dans certains
exposés de ce colloque lyonnais le même langage que celui d'une
certaine presse algérienne, aveuglément calomniatrice de notre
Histoire de France ! « Fiers d'être français... » écrit Max Gallo
? En sortant de ce colloque, à plus d'un titre, nous pouvions
en douter... MALHEUREUSE COMMUNAUTE DES FRAN‚AIS D'ALGERIE ! QUELLE
INVRAISEMBLABLE CARICATURE QUE CELLE QUI NOUS EN FUT DONNEE !
C'est en vain que les représentants de VERITAS tentèrent de protester
contre ces calomnies en séries ! Le refus de toute discussion
de la part des orateurs, et l'hostilité du public ne permirent
aucun débat, aucun apport de vérité historique contre les dénaturations
et les falsifications énoncées !
Pour garder bonne conscience devant le public, les organisateurs
avaient cité quelques associations inexistantes ou fantomatiques
ayant pu participer à l'élaboration des thèmes concernant les
Français d'Algérie, faisant référence, entre autres - suprême
ironie - à l'association France-Algérie fondée par... les amis
du FLN !
On ne pouvait afficher davantage de mépris pour toute la communauté
des Français rapatriés d'Algérie, communauté qui représente pourtant,
à ce jour, avec ses descendants, plus d'un million de citoyens
! Une telle discrimination et une telle exclusion dans une république
se prétendant démocratiaue sont totalement incompatibles avec
le principe d'égalité des citoyens, car il ne s'agissait pas d'une
organisation privée quelconque, mais d'un colloque patronné par
le service public de l'Education Nationale !
Le même mépris a frappé toutes les associations représentatives
des rapatriés, de civils ou de Harkis. Aucune de ces dernières
n'a été contactée et l'annonce ambigu‘ annonçant le thème du drame
des supplétifs de l'Armée française, était elle-même très équivoque
: « Au-delà de la victimisation et de l'opprobre : les Harkis.
».
Mohand Hamoumou, auteur du livre-document « Et ils sont devenus
Harkis » qui révéla à l'opinion française et au monde entier la
tragédie, livre servant de référence à toute étude historique
sérieuse et objective, avait demandé aux organisateurs de ce colloque
de pouvoir participer à la rédaction du thème prévu sur le sujet.
Cette coopération fut refusée en raison de... la qualité « d'historien
engagé » de l'auteur !... On lui préféra un jeune étudiant inconnu,
en instance de thèse, jugé « plus compétent », car plus en phase
avec « l'esprit du colloque », dont l'idéologie dominante ne pouvait
que récuser acteurs et témoins dès l'instant que ces derniers
risquaient, par leurs témoignages véridiques, de remettre en cause
cette idéologie !
Rien n'est plus incompatible avec l'enseignement de l'Histoire,
rien ne ressemble plus à un endoctrinement politique ! Ce ne sera
pas à l'honneur de ce colloque de Lyon de n'avoir ni osé, ni même
voulu, aborder franchement l'ampleur de la tragédie de ces Français
musulmans, non seulement Harkis, mais aussi celle des élus musulmans
(près de SIX MILLE !) qui furent livrés aux atrocités du FLN !
Que penser de l'attitude de la « Chaire lyonnaise des Droits
de l'Homme » devant une pareille dérobade ???
En réalité aucune association de rapatriés d'Algérie, civils
ou Harkis, n'a eu le droit à la parole dans ce colloque. Les organisateurs
auraient d˛ avoir la franchise et l'honnêteté de le déclarer dès
l'ouverture, le mardi 20 juin, et surtout, de ne pas faire écrire
dans le journal « Le Progrès de Lyon » le 19 juin 2006, que «
ces associations avaient refusé les invitations » qu'elles n'avaient
jamais reçues, et pour cause !!!
L'exemple de l'hostilité historique franco-allemande enfin dépassée
par une politique de réconciliation résolue, qui va être matérialisé
dans un projet de rédaction en commun d'une « HISTOIRE FRANCO-ALLEMANDE
» n'était-il pas encourageant ? Rappelons, à ce propos, qu'en
2002 déjà, un livre remarquable, rédigé en commun par un officier
français, Le Commandant Elie Denoix de Saint Marc et un officier
allemand anti-nazi, Hugo von Kageneck, intitulé « NOTRE HISTOIRE
1922 - 1945 » avait ouvert la voie à ce projet.
Pour qu'une oeuvre semblable de réconciliation puisse être conçue
dans un même esprit entre la France et l'Algérie, faudrait-il
faire appel, de la même manière à deux témoins dont l'un, français
aurait rejeté l'idéologie partisane de la nomenklatura, et l'autre,
algérien, aurait refusé les pratiques barbares et le césarisme
du FLN ?
Nous attendons la communication dans le détail qui doit être
faite à tous les citoyens qui se sont inscrits comme auditeurs
de cette « Histoire critique et citoyenne » dont , bien entendu
plusieurs membres de notre comité, pour prendre les décisions
qui s'imposeront, comme nous l'avons toujours fait envers les
faussaires de l'Histoire. Citons, pour exemple l'amiral Philippe
De Gaulle dont nous avons obtenu la condamnation au plan correctionnel
!
Dans cette attente et en conclusion, nous déplorons que ce colloque
de Lyon, organisé par l'Education Nationale, n'ait pas tenu compte
de la loi Savary de 1985 qui stipule, en son article 3 : « Le
Service Public de l'Enseignement Supérieur est laïc et indépendant
de toute emprise politique, économique, religieuse et idéologique
: il tend à l'objectivité du savoir et il respecte la diversité
des opinions ».
Contrevenant de façon évidente à ces deux principes réglementaires,
le colloque de Lyon perd beaucoup de sa valeur pédagogique, et
par son excès flagrant de partialité, il perd toute crédibilité
devant l'opinion publique. L'épreuve du temps l'a largement montré
: devant l'Histoire, tout ce qui est excessif tombe dans l'insignifiance.
Docteur Pierre CATTIN